Le 8 décembre 2004, l'Agence Européenne du médicament (EMEA) a fait le point sur les données concernant le risque de comportement suicidaire associé à l'utilisation des antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) chez l'enfant et l'adolescent.
Parallèlement à l'évaluation effectuée à l'échelle européenne, qui a inclus le réexamen du rapport bénéfice-risque du Deroxat®, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits des santé (Afssaps), comme d'autres autorités de santé, a engagé dès juin 2003, la révision de l'ensemble des données sur les antidépresseurs IRS1
. Cette réévaluation est intervenue après que l'Afssaps a eu connaissance des résultats d'essais cliniques conduits avec des antidépresseurs (Deroxat® d'une part et Effexor® d'autre part) chez des enfants et des adolescents souffrant de dépression.
Ces études ne démontraient pas l'efficacité de ces médicaments dans cette indication et suggéraient une augmentation du risque de comportement suicidaire chez les enfants et adolescents traités comparativement aux patients recevant le placebo. Aucun décès par suicide n'avait cependant été rapporté pendant ces études. Leurs résultats ont fait l'objet de communiqués diffusés par l'Afssaps en juin 2003 (Deroxat® ) et septembre 2003 (Effexor®).
C'est dans le contexte de l'évaluation européenne, et après discussion le 8 décembre 2004 au sein du Comité scientifique compétent à l'échelon européen, que l'EMEA apporte les informations suivantes aux prescripteurs et aux patients, par le biais d'un communiqué délivré sur son site le 9 décembre 2004 :
- dans l'Union Européenne, les antidépresseurs IRS n'ont pas l'indication dans le traitement de la dépression chez les patients de moins de 18 ans;2
- leur prescription est déconseillée dans cette population en raison d'une augmentation du risque de comportement suicidaire (idées suicidaires, tentatives de suicide) et de comportement tel que l'auto- ou l'hétéro-agressivité, mis en évidence chez ces patients ;
- si la prescription d'un antidépresseur s'avère nécessaire chez un enfant ou un adolescent, elle doit s'accompagner d'une surveillance étroite du patient et de la recherche d'un comportement suicidaire, particulièrement en début de traitement ;
- l'arrêt de la prise d'un antidépresseur ne doit pas se faire sans avis médical. Si l'arrêt est décidé, il doit être progressif (sur plusieurs semaines ou mois) afin de diminuer le risque de survenue d'un syndrome de sevrage, pouvant se manifester par des symptômes tels que vertiges, troubles du sommeil, anxiété et céphalées ;
- pour toute question relative au traitement antidépresseur, il est conseillé aux patients ou à leurs parents de consulter leur médecin.
L'EMEA confirme que le rapport bénéfice-risque du Deroxat® est favorable dans le traitement de la dépression chez l'adulte et attire l'attention des prescripteurs sur les mises en garde suivantes :
- l'emploi de Deroxat® est déconseillé chez l'enfant et l'adolescent,
- il est important de surveiller les patients à risque de comportement suicidaire (c'est à dire les patients ayant des antécédents de comportement suicidaire avant l'instauration du traitement, et les jeunes adultes),
- il faut prendre en compte le risque de survenue d'un syndrome de sevrage à l'arrêt du traitement, généralement modéré, mais pouvant chez certains patients être plus sévère et/ou prolongé. Ce risque nécessite une diminution progressive des posologies.
L'Agence française de sécurité sanitaire des produits des santé (Afssaps)
- rappelle que le traitement de première intention de la dépression de l'enfant et de l'adolescent est une prise en charge psychothérapeutique, et que la prescription d'antidépresseurs, si elle est envisagée, ne doit intervenir qu'en seconde intention, dans le cadre d'une dépression majeure, avec une prise en compte de l'ensemble des bénéfices attendus et des risques possibles ; en cas de prescription d'antidépresseurs, une surveillance étroite du patient doit être effectuée et s'accompagner de la recherche d'un comportement suicidaire, surtout en début de traitement.
- souligne que la conférence de consensus de décembre 1995 portant sur les troubles dépressifs chez l'enfant mentionne l'absence de démonstration d'efficacité d'autres antidépresseurs de commercialisation plus ancienne - en particulier des tricycliques - dans l'indication dépression chez l'enfant et l'adolescent 3
1 En France, 9 médicaments antidépresseurs appartenant à cette classe thérapeutique sont commercialisés : Floxyfral® (fluvoxamine, 1986), Prozac® (fluoxétine, 1989), Seropram® (citalopram, 1995), Deroxat® (paroxétine, 1995), Effexor® (venlafaxine, 1997), Ixel® (milnacipran, 1997), Zoloft® (sertraline, 1997), Norset® (mirtazapine, 1999), et Seroplex® (escitalopram, 2004).
2 En France, leur emploi est déconseillé, voire contre-indiqué chez l'enfant et l'adolescent, à l'exception de Zoloft® et de Floxyfral® qui possèdent une indication chez l'enfant et l'adolescent dans le traitement des Troubles Obsessionnels compulsifs (TOC).
3 Conférence de consensus : les troubles dépressifs chez l'enfant : Reconnaître, soigner, prévenir. Devenir. 14-15 décembre 1995 (http://psydoc-fr.broca.inserm.fr/conf&rm/conf/confdepression.html )
Contact presse : Aude Chaboissier Tél. 01 55 87 30 33 - aude.chaboissier@afssaps.sante.fr