Lors de sa réunion mensuelle qui s’est tenue du 5 au 8 mai 2014 à Londres, le Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) a poursuivi la réévaluation du rapport bénéfice/risque d’ICLUSIG (ponatinib) et engagé celles des médicaments à base d’hydroxyzine et à base d’ivabradine.
Médicament ICLUSIG® (ponatinib) : réévaluation du rapport bénéfice/risque
ICLUSIG® est un médicament orphelin qui bénéficie d’une AMM européenne depuis juillet 2013 en traitement de 2e ou 3e intention de l’adulte dans la leucémie myéloïde chronique ou de la leucémie aiguë lymphoblastique à chromosome Philadelphie, ou en traitement de 1e intention chez les patients exprimant la mutation T315I.
Les discussions au PRAC suivent les alertes lancées sur le sujet par la FDA à la fin de l’année dernière. En effet, une augmentation de la fréquence des événements thrombotiques veineux et artériels a été observée alors que le produit est commercialisé aux USA depuis décembre 2012. En novembre 2013, l’analyse par la FDA des données du suivi prolongé de deux essais cliniques montrait une proportion importante (entre 24 et 48 %) de patients ayant présenté des événements indésirables graves dont des cas d’évolution fatale (AVC, infarctus massif, ischémie périphérique…), sans pouvoir identifier une dose ou une durée de traitement permettant de sécuriser l’administration de ICLUSIG®.
En novembre dernier, à l’issue des premières discussions sur le sujet, le PRAC a recommandé une approche en deux temps :
- modification rapide du résumé des caractéristiques du produit de ICLUSIG® afin d’attirer l’attention des professionnels de santé et de renforcer l’information sur le risque thrombogène du résumé des caractéristique du produit (RCP) (rubriques 4.2, 4.4 et 4.8). Une DHPC a été adressée en France aux professionnels de santé en décembre 2013 afin de les informer des modifications apportées ;
- initiation d’un arbitrage européen dans un 2e temps afin d’évaluer la nécessité d’adapter la dose, d’analyser plus précisément les cas d’effets indésirables thrombogènes et d’explorer le mécanisme.
La Commission européenne a initié cet arbitrage selon l’article 20 fin novembre 2013, sans prise de mesure urgente dans l’intervalle. Le Royaume-Uni et la Suède ont été désignés respectivement rapporteur et co-rapporteur pour ce dossier.
Le PRAC de mai 2014 avait pour but d’évaluer les réponses du laboratoire à la liste de questions élaborées par le PRAC dans le cadre de l’arbitrage. A l’issue de la discussion, une liste complémentaire de questions au laboratoire est apparue nécessaire afin de préciser ou clarifier certains points et d’affiner les mesures de minimisation des risques à envisager. Ainsi, la liste élaborée inclut notamment l’évaluation complémentaire des données de sécurité, une éventuelle modification du libellé des indications, le mécanisme potentiel des événements thrombogènes, des données de pharmacocinétique, des données sur une potentielle réduction de la dose à proposer et les mesures de minimisation des risques additionnelles à envisager.
Les prochaines discussions sont prévues pour le PRAC de juillet 2014.
Dans l’attente de la décision finale sur cet arbitrage, l’ANSM rappelle la nécessité de prendre en compte et respecter les recommandations de bon usage et de précaution d’emploi de ce médicament, notamment en ce qui concerne le risque thrombogène artériel et veineux, récemment renforcées dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP). |
Réévaluation du rapport bénéfice/risque des médicaments à base d’hydroxyzine
Les médicaments à base d’hydroxyzine sont indiqués dans des indications diverses au sein de l’UE. En France, les indications incluent les manifestations mineures de l’anxiété, la prémédication à l’anesthésie générale, le traitement symptomatique de l’urticaire et les troubles du sommeil chez l’enfant de plus de 3 ans (en 2e intention). Les spécialités commercialisées en France sont ATARAX® et HYDROXYZINE RENAUDIN®.
A la suite de la notification de cas de pharmacovigilance rapportant des effets indésirables suggérant un allongement de l’intervalle QT et de résultats d’études non cliniques, le laboratoire UCB a réalisé, d’une part une revue des données disponibles concernant le risque d’allongement de l’intervalle QT de l’hydroxyzine et, d’autre part, le bénéfice de l’hydroxyzine dans chacune de ses indications.
Dans ce contexte, la Hongrie a souhaité initier une réévaluation du rapport B/R de l’hydroxyzine dans toutes ces indications actuelles. La France et la Hongrie ont été désignées respectivement rapporteur et co-rapporteur.
Une liste de questions à destination des laboratoires concernés a été adoptée.
Les premières discussions au PRAC sont prévues pour novembre 2014.
Le risque d’allongement de l’intervalle QT est déjà mentionné dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) de certains médicaments à base d’hydroxyzine. Dans l’attente de la décision finale sur cet arbitrage, l’ANSM rappelle de prendre en compte ce risque et de respecter les recommandations du RCP. |
Médicament à base d’ivabradine (PROCORALAN® et CORLENTOR®) : réévaluation du rapport bénéfice/risque
Les médicaments à base d’ivabradine sont autorisés depuis fin 2005 selon une procédure centralisée et sont indiqués, d’une part dans le traitement symptomatique de l’angor stable chronique chez les adultes présentant une intolérance ou une contre-indication aux bêta-bloquants, ou en association aux bêta-bloquants chez des patients insuffisamment contrôlés par une dose optimale de bêta-bloquants et, d’autre part, dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique en association au traitement standard.
L’analyse des résultats préliminaires de l’étude randomisée, contrôlée contre placebo « SIGNIFY » montre une augmentation statistiquement significative du risque combiné de décès cardiovasculaire et d’infarctus du myocarde non fatal dans un sous-groupe de patients présentant un angor symptomatique et traité par ivabradine, comparativement au groupe placebo. Les patients inclus dans cette étude présentaient notamment une pathologie coronaire stable et un rythme cardiaque d’au moins 70 bpm et recevaient un traitement par ivabradine jusqu’à 10 mg deux fois par jour, soit une posologie plus élevée que la dose d’ivabradine actuellement recommandée (7,5 mg deux fois par jour).
Au vu de ces données, la Commission européenne a jugé nécessaire d’initier une réévaluation du rapport B/R de ces médicaments dans le cadre d’un article 20.
Les premières discussions au PRAC sont prévues pour juillet 2014.