L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a initié en janvier 2013 une réévaluation du rapport bénéfice/risque des contraceptifs hormonaux combinés (CHC, incluant les pilules, l’anneau vaginal et le patch) contenant des progestatifs dits de 3e et 4e générations (désogestrel, diénogest, gestodène, norgestimate, drospirénone, chlormadinone, nomégestrol, étonogestrel et norelgestromine). Lors de sa session de novembre 2013, le Comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) a adopté une position finale. Le rapport bénéfices/risques des CHC reste favorable, le risque bien connu de thrombo-embolie veineuse est maintenant mieux pris en considération. La position du CHMP doit maintenant être examinée par la Commission européenne.
Conclusions scientifiques de l’évaluation européenne
Au cours du processus d’évaluation, l’ensemble des données disponibles (données d’exposition, données de pharmacovigilance, études pharmaco-épidémiologiques) a fait l’objet d’une analyse par le Royaume-Uni et la France qui étaient en charge du dossier. En octobre 2013, le Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’EMA a rendu les conclusions scientifiques suivantes qui ont été entérinées par le CHMP :
- le rapport bénéfice/risque de chaque CHC est favorable avec une efficacité contraceptive identique de tous les CHC ;
- les données scientifiques disponibles n’apportent pas la preuve d’une différence en termes de tolérance entre les différents CHC ;
- le risque thrombo-embolique, bien que faible, est supérieur chez les femmes utilisatrices de CHC par rapport à celles qui n’en prennent pas. Il est maximum lors de la première année d’utilisation et augmenté lors de la reprise de la contraception après une interruption de plus de 4 semaines ;
- le risque de thrombose veineuse diffère selon les CHC en fonction du progestatif qu’ils contiennent ;
- les différences de risque thromboemboliques veineux lié au progestatif sont insuffisamment connues des professionnels de santé et des femmes et les facteurs de risque insuffisamment pris en compte ;
- le sur-risque généré par les CHC contenant les progestatifs les plus récents (désogestrel, gestodène, drospirénone, étonogestrel et norelgestromine) en termes d’événements thromboemboliques veineux et de décès au niveau européen est reconnu ;
- les données concernant les risques de survenue de thrombose veineuse sont maintenant actualisées dans les résumés des caractéristiques des produits et synthétisées dans le tableau ci-dessous :
Risque de survenue de thrombo-embolie veineuse par an | |
Femmes en âge de prendre la pilule et qui n’utilisent pas de CHC et qui ne sont pas enceinte (risque de base) | Environ 2 pour 10 000 femmes |
Femmes utilisant un CHC contenant du levonorgestrel, de la norethisterone ou du norgestimate | Environ 5-7 pour 10 000 femmes |
Femmes utilisant un CHC contenant de l’étonogestrel ou de la norelgestromine | Environ 6-12 pour 10 000 femmes |
Femmes utilisant un CHC contenant de la drospirenone, du gestodene ou du desogestrel | Environ 9-12 pour 10 000 femmes |
Femmes utilisant un CHC de la chlormadinone, du dienogest ou du nomegestrol | Le risque n’est pas encore connu* |
* Des études sont en cours ou prévues pour collecter des données suffisantes pour évaluer le risque lié à ces produits.
- les autres facteurs de risque doivent être attentivement et régulièrement évalués et pris en compte par les professionnels de santé lors de chaque prescription/renouvellement ;
- le risque de thrombose artérielle est supérieur chez les femmes utilisatrices de CHC par rapport à celles qui n’en prennent pas. Ce risque est identique entre les différents CHC, c'est-à-dire quel que soit le progestatif qu’ils contiennent.
Modifications et recommandations aux pays membres
Afin de mieux informer les prescripteurs et les femmes des différences de risque entre les CHC, le CHMP modifie les autorisations de mise sur le marché, concernant l’indication, les contre-indications et les précautions d’emploi des CHC concernés par la réévaluation. En particulier, une mise à jour des incidences de thrombose veineuse en fonction des données épidémiologiques les plus récentes est effectuée.
Par ailleurs des documents éducationnels et d’information à destination des femmes et des professionnels de santé, établis au niveau européen, vont être adaptés au plan national. Enfin, des études épidémiologiques complémentaires doivent être réalisées pour les CHC pour lesquels il n’existe pas de données ou des données insuffisantes concernant leur risque thromboembolique.
L’ANSM travaille actuellement sur la mise en œuvre en France de ces mesures en lien avec les professionnels, les associations de patients et les industriels.
Recommandations de l’ANSM aux professionnels et aux femmes
L’ANSM veut à cette occasion rappeler ses recommandations et celles de l’HAS sur le bon usage des CHC :
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