Médicaments à base de cyprotérone, à base de méthotrexate, fluoropyrimidines, GILENYA (Fingolimod) : retour d’information sur le PRAC de juillet 2019 - Point d'information

08/08/2019
Lors de la réunion mensuelle du Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA), qui s’est tenue du 8 au 11 juillet 2019 à Amsterdam, le PRAC a démarré une procédure de réévaluation pour les médicaments à base de cyprotérone, finalisé celles concernant les produits à base de méthotrexate et de Gilenya (Fingolimod) et poursuivi la revue des données concernant les fluoropyrimidines.
Démarrage d’une procédure de réévaluation européenne (arbitrage de sécurité - article 31) concernant les médicaments à base de cyprotérone – risque de méningiome

L’acétate de cyprotérone est un dérivé de la progestérone ayant des propriétés anti-androgéniques. En France, les indications dépendent du dosage de cyprotérone :

  • les comprimés à 50 mg sont indiqués dans le traitement des hirsutismes féminins majeurs d'origine non tumorale (idiopathique, syndrome des ovaires polykystiques), lorsqu'ils retentissent gravement sur la vie psycho-affective et sociale, et dans le traitement palliatif anti-androgénique du cancer de la prostate ;
  • les comprimés à 100 mg sont indiqués dans le traitement palliatif anti-androgénique du cancer de la prostate et la réduction des pulsions sexuelles dans les paraphilies en association à une prise en charge psychothérapeutique.

Depuis 2009, l’acétate de cyprotérone fait l’objet d’une surveillance particulière suite au signal émis par la France au niveau européen sur le risque d’apparition de méningiome. L’évaluation de ce signal par l’Agence européenne des médicaments (EMA) a conduit à faire figurer ce risque dans la notice du médicament en 2011.

Pour préciser la relation entre la prise du médicament et le risque de méningiome, l’Assurance maladie a mené une étude pharmaco-épidémiologique.

Suite à la publication des résultats de cette étude, l’ANSM a transmis à l’Agence européenne des médicaments (EMA) le rapport complet de l’étude ainsi que les résultats d’une enquête de pharmacovigilance sur les risques de méningiome lors d’une utilisation prolongée d’acétate de cyprotérone.

Sur la base de ces documents, l’ANSM a demandé à l’EMA de mener une réévaluation du rapport bénéfice/risque de l’ensemble des médicaments contenant de l’acétate de cyprotérone.

Par ailleurs, à titre de précaution, l’ANSM a demandé que les médicaments contenant de l’acétate de cyprotérone faiblement dosé soient également inclus dans cette réévaluation. Toutefois, à ce jour, les données concernant un éventuel risque de méningiome associé à l’utilisation de ces médicaments sont très limitées. En France, les spécialités faiblement dosées sont les suivantes :

  • les comprimés à 2 mg associés à 0,035 mg d’éthinylestradiol (Diane 35 et génériques) sont indiqués dans le traitement de l’acné modérée à sévère liée à une sensibilité aux androgènes (associée ou non à une séborrhée) et/ou de l’hirsutisme, chez les femmes en âge de procréer ;
  • les comprimés à 2 mg associés à 0,035 mg de valérate d'estradiol (Climene) sont notamment indiqués dans le traitement hormonal substitutif (THS) des symptômes de déficit en estrogènes chez les femmes ménopausées.

La réévaluation du rapport bénéfice/risque a été débutée par le PRAC lors de la réunion du mois de juillet 2019. Le PRAC va désormais revoir l’ensemble des données disponibles en vue d’une recommandation européenne.

Depuis le 1er  juillet 2019, l’ANSM a renforcé l’information et la surveillance des patients lors de la prescription et de la dispensation des spécialités à base d’acétate de cyprotérone dosées à 50 ou 100 mg (Androcure et ses génériques) et modifié les résumés des caractéristiques (RCP) et les notices de ces produits.

Une attestation annuelle d’information doit être signée par le patient et le prescripteur avant toute prescription. Le patient doit impérativement présenter une copie de l’attestation signée au pharmacien avant toute délivrance du médicament.

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Finalisation de la réévaluation  (arbitrage de sécurité - article 31) des produits à base de méthotrexate en raison des risques associés d’erreur médicamenteuse

Le méthotrexate a de nombreuses indications en oncologie (leucémies aiguës lymphoblastiques) et dans des maladies auto-immunes (polyarthrite rhumatoïde, l’arthrite chronique juvénile, la maladie de Crohn, le psoriasis etc…).

En France dans ces indications la prise de méthotrexate par voie orale s’effectue une seule fois par semaine et la posologie s’exprime en mg/semaine.

Depuis 2007, des erreurs de prises du méthotrexate par voie orale (prises quotidiennes au lieu d’une prise hebdomadaire ) ont été rapportées, la plupart associées à des effets indésirables graves d’évolution parfois fatale.

Bien que ce risque d’erreur médicamenteuse soit connu avec le méthotrexate depuis de nombreuses années et malgré les mesures prises pour réduire ce risque dans certains pays (dont la France), des cas de surdosage sont toujours notifiés.

De ce fait, une procédure d’arbitrage de sécurité (selon l’article 31 de la directive européenne 2001/83/EC) a été initiée au niveau Européen en avril 2018 afin d’analyser les raisons de ces erreurs et de discuter de la mise en place de mesures pour réduire le risque.

Le PRAC a achevé son évaluation et a conclu, au cours de sa séance de juillet 2019, à la nécessité de mettre en place de nouvelles mesures de réduction de risque.

Les mesures de réduction de risque qui seront mises en place comprennent notamment la restriction de prescription de ces médicaments à des professionnels de santé expérimentés, le renforcement des mises en garde sur les conditionnements, la mise à disposition de matériel pédagogique à destination des patients/aidants et des professionnels de la santé, et une carte patient qui sera attachée aux conditionnements.

De plus, afin de ne pas induire en erreur les patients et les professionnels de santé sur la posologie adéquate (une fois par semaine) des formes comprimés, le PRAC a recommandé la généralisation des conditionnements blisters (plaquettes thermoformées) ; les autres conditionnements des formes orales seront progressivement remplacés.

Résumé des mesures visant à prévenir ces erreurs :

  • Seuls les médecins expérimentés seront autorisés à prescrire les spécialités à base de méthotrexate.
  • Les professionnels de santé doivent s'assurer que les patients/aidants ont bien compris la nécessité de se conformer à la posologie hebdomadaire.
  • Pour éviter toute confusion, les recommandations de fractionnement de la dose doivent être supprimées des "informations produit" des spécialités sous forme de comprimés  (Résumé des caractéristiques produit (RCP) et notice).
  • Les conditionnements de toutes les spécialités à base de méthotrexate prises une fois par semaine devront comporter un  « rappel visuel »  rappelant la nécessité de respecter la prise hebdomadaire
  • Un document de réduction de risques (carte patient) indiquant le jour de prise hebdomadaire sera mis à disposition des patients/aidants en même temps que le médicament.
  • Un document de réduction de risques à destination des professionnels de la santé sera mis en place avec pour objectif le rappel de la nécessité d’informer le patient sur les conséquences graves liées aux risques d’erreur.
  • Disponibilité des comprimés uniquement sous forme de blisters (plaquettes thermoformées) (mesures mises en place progressivement).

 

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Fluoropyrimidines (5-fluorouracile, (5-FU) capécitabine et tegafur) et prodrogues du 5-fluorouracile : capecitabine, tegafur et flucytosine : " 5-FU et déficit en DPD "

Le fluorouracile (administré par injection), la capécitabine et le tégafur sont des médicaments anticancéreux, tandis que le fluorouracile topique (appliqué sur la peau) est utilisé pour diverses affections cutanées et que la flucytosine est un médicament utilisé dans les infections fongiques graves.

A l’issue des discussions du PRAC du mois de mars 2019, l'EMA a entamé une revue des données sur les médicaments contenant du fluorouracile (également appelé 5-fluorouracile ou 5-FU) et sur les médicaments prodrogues du 5-fluorouracile (capécitabine, le tégafur et la flucytosine).

Cette revue est réalisée dans le cadre d’une procédure européenne (arbitrage de sécurité -article 31-)  initié à la demande de l’ANSM suite aux travaux français et aux recommandations de l’INCA, de la HAS et de l’ANSM concernant la nécessité du dépistage systématique du déficit en dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD).

Lors de sa séance de juillet 2019 le PRAC a présenté le résultat de l’analyse des données reçues de la part des détenteurs d’AMM concernés et a décidé d’adresser aux détenteurs d’AMM une nouvelle liste de questions.

Les prochaines discussions se dérouleront au PRAC de décembre (qui aura lieu du 25 au 28 Novembre 2019)

En France, dans l’attente des conclusions de cet arbitrage, l’ANSM a modifié les conditions de prescription et de délivrance du 5-FU et de la capécitabine afin que leur prescription, leur dispensation et leur administration soient conditionnées à l’obtention des résultats du test de dépistage d’un déficit en dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD).

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Finalisation de l’évaluation de données de sécurité pour GILENYA (Fingolimod 0,25 mg et 0,5 mg gélule) : nouvelle contre-indication chez les femmes enceintes et chez les femmes en âge de procréer n'utilisant pas de contraception efficace

Gilenya est indiqué en monothérapie comme traitement de fond des formes très actives de sclérose en plaques (SEP) rémittente-récurrente pour les groupes de patients adultes et pédiatriques âgés de 10 ans et plus suivants :

  • Patients présentant une forme très active de la maladie malgré un traitement complet et bien conduit par au moins un traitement de fond de la sclérose en plaques.

Ou

  • Patients présentant une sclérose en plaques rémittente-récurrente sévère et d'évolution rapide, définie par 2 poussées invalidantes ou plus au cours d'une année associées à 1 ou plusieurs lésion(s) rehaussée(s) après injection de gadolinium sur l'IRM cérébrale ou une augmentation significative de la charge lésionnelle en T2 par rapport à une IRM antérieure récente.

Les données de sécurité liées à l’utilisation pendant la grossesse suggèrent que le risque de malformations congénitales majeures est deux fois plus élevé chez les nourrissons nés de mères exposées au fingolimod pendant la grossesse que celui observé dans la population générale (2-3%; EUROCAT).

Le PRAC au cours de sa séance de juillet 2019 a recommandé, au vu de ces données, de contre-indiquer l’utilisation de Gilenya au cours de la grossesse et chez les femmes en âge de procréer n’utilisant pas de contraception efficace. Ces mesures renforcent les recommandations qui existaient jusqu’à présent.

Actuellement, pour les femmes en âge de procréer, un résultat négatif au test de grossesse doit être disponible à l’initiation et une contraception efficace est recommandée pendant le traitement avec Gilenya et jusqu'à deux mois après son arrêt.

En plus de ces mesures, une nouvelle "carte patient" spécifique à la grossesse sera mise en place. Il est prévu qu’une lettre d’information soit adressée aux professionnels de santé en septembre 2019 afin de les informer de ce nouveau risque.

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