Lors de sa réunion mensuelle, qui s’est tenue du 6 au 9 juin à Londres, le Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) a pris en compte le signal concernant le riociguat dans un essai clinique. Il a poursuivi la revue des données dans le cadre de l’arbitrage en cours pour les produits de contraste contenant du gadolinium. Le PRAC a également adopté les « PRAC best practice guidance ».
Riociguat-ADEMPAS : signal d’augmentation de la mortalité et des évènements indésirables graves dans un essai clinique multicentrique international étudiant les effets du riociguat chez des patients présentant une hypertension artérielle pulmonaire associée à une pneumopathie interstitielle idiopathique.
Le riociguat est un stimulateur direct de la guanylate cyclase soluble (sGC). Il a obtenu une autorisation de mise sur le marché (ADEMPAS) dans le cadre d’une procédure centralisée en mars 2014, dans le traitement de l’hypertension pulmonaire thromboembolique chronique non opérable ou récurrente/ persistante après endartériectomie, et dans le traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire idiopathique, héritable ou associée à une connectivite.
Le 9 mai 2016, le laboratoire Bayer a arrêté prématurément l’essai multicentrique international testant le riociguat chez des patients atteints d’hypertension artérielle pulmonaire associée à une pneumopathie interstitielle idiopathique (essai RISE-IIP). L’arrêt prématuré de cet essai fait suite à une analyse intermédiaire réalisée par le comité indépendant de suivi (DMC) de l'étude ayant mis en évidence une augmentation de la mortalité et des évènements indésirables graves prédominant à l'initiation et lors de la phase d'ascension de doses dans le groupe traité par le riociguat comparativement au groupe placebo. L'analyse concomitante des critères d'efficacité [test de marche de 6 minutes (TDM6)] réalisé par le DMC n'a en outre pas retrouvé de bénéfice du riociguat par rapport au placebo. Le DMC a alors recommandé l'arrêt immédiat des traitements dans cet essai et le suivi des patients traités pendant 4 mois après l'arrêt du traitement. Les causes de décès sont majoritairement liées à des évènements pulmonaires variés concernant plus particulièrement des patients présentant une pathologie plus sévère, mais le mécanisme à l'origine de la surmortalité n'est pas clairement identifié à ce stade. Le promoteur réalise des investigations et analyses complémentaires sur les possibles causes des résultats observés dans cette étude et un rapport approfondi est attendu.
Le PRAC a été saisi de ce nouveau signal. A l'issue de l'évaluation par l'état membre rapporteur (UK) des données disponibles fournies par le laboratoire et après audition de celui-ci, le PRAC a conclu que le rapport bénéfice/risque de ADEMPAS dans ses indications actuelles restait inchangé mais a recommandé de contre-indiquer ADEMPAS chez les patients atteints d’hypertension artérielle pulmonaire associée à une pneumopathie interstitielle idiopathique et de mentionner les résultats de l’étude RISE-IIP dans le résumé des caractéristiques du produit. Le document du plan de gestion de risque d'ADEMPAS (PGR) sera mis à jour en conséquence.
Le CHMP doit se prononcer sur ces mesures lors de sa réunion du mois de juin, pour leur mise en application dans l'attente des résultats des investigations complémentaires en cours.
Après approbation du CHMP, le laboratoire enverra une lettre aux professionnels de santé les informant des résultats de l’étude RISE-IIP, des recommandations et mesures adoptées.
Dans l'attente de la finalisation de la procédure et de la mise à jour des documents, l'ANSM recommande de respecter les indications de l'AMM actuelle de ADEMPAS et de ne pas utiliser le riociguat chez les patients présentant une hypertension artérielle pulmonaire associée à une pneumopathie interstitielle idiopathique. |
Réévaluation du rapport bénéfice/risque des produits de contraste contenant du gadolinium
Les produits de contraste contenant du gadolinium sont utilisés comme produits diagnostiques afin d’améliorer le contraste des images lors des procédures d’IRM. Ils sont administrés avant ou pendant l’IRM. Il existe deux classes de produits : les linéaires (Omniscan®, Optimark®, Magnevist®, Multihance®, Primovist®) et les macrocycliques (Prohance®, Gadovist®, Dotarem®).
Les données animales et cliniques actuellement disponibles montrent que le gadolinium s’accumule dans les tissus, notamment le foie, les reins, les muscles, la peau et les os. Plusieurs articles de la littérature ont récemment montré que le gadolinium s’accumule également dans le cerveau. Après discussion de ces articles au PRAC de janvier 2016, et bien qu’aucun cas d’effet indésirable en lien avec ces dépôts dans le cerveau n’a été identifié à ce jour, le comité a jugé nécessaire de revoir attentivement ces données et le profil global de sécurité de ces produits de contraste.
Par conséquent, le PRAC a démarré en mars 2016, en accord avec la Commission européenne (article 31), une revue des données disponibles sur l’accumulation du gadolinium dans les tissus et ses conséquences cliniques, afin de déterminer si celle-ci a un impact sur le rapport bénéfice/risque de ces produits utilisés pour l’imagerie IRM. Le rapporteur et le co-rapporteur désignés pour cet arbitrage sont respectivement le Royaume-Uni et le Danemark.
Une première liste de questions a été envoyée aux laboratoires en mars. Au PRAC de juin, le Royaume-Uni et le Danemark ont présenté les données soumises par les laboratoires. A l’issue des discussions, mettant en avant un potentiel risque d’accumulation plus important dans les études animales avec les produits de type linéaire, une nouvelle liste de questions pour les laboratoires a été adoptée. Le comité a également adopté la liste de questions à poser au groupe d’experts qui doit se réunir le 05 septembre 2016. Dans l’attente de ces nouvelles données et de l’avis du groupe d’experts, le PRAC ne recommande pas à ce jour de modifications de l’information des produits de contraste contenant du gadolinium. Une prochaine discussion est prévue au PRAC d’octobre.
Finalisation des recommandations pour l’amélioration de l’efficience du PRAC
Le PRAC informel du Luxembourg (2015) avait été l’occasion de lancer la réflexion sur les possibilités d’amélioration de l’efficience du PRAC. Pour cela, un groupe de travail, regroupant des membres du PRAC et du personnel de l’EMA a été créé fin 2015 afin de travailler sur différents aspects du PRAC et voir les points d’amélioration possibles (à court terme ou plus long terme). Ce mois-ci a été adoptée la version finale du « PRAC best practice guidance » qui est destinée aux membres du PRAC et leurs suppléants mais également aux équipes d’évaluation des agences nationales.
Les suggestions tournent autour de 3 thèmes principaux :
- l’optimisation de la préparation des membres du PRAC et leurs suppléants avant la réunion mensuelle plénière,
- l’optimisation du nombre de dossiers à discuter en réunion plénière (critères pour la discussion versus l’adoption silencieuse)
- et l’optimisation des présentations faites et des discussions qui ont lieu au cours de la séance plénière.
Une mise en pratique a été testée dès le PRAC de Juin.