Décision du 02/10/2020 fixant des conditions particulières de collecte des selles, y compris dans le cadre de recherches impliquant la personne humaine, de réalisation des préparations magistrales et hospitalières et de fabrication des médicaments, y compris expérimentaux, à partir de microbiote fécal dans le contexte de l'épidémie de DE COVID-19 (Virus SARS-CoV2)

09/10/2020

Le directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM),

Vu le code de la santé publique (CSP) et notamment les articles L. 1121-1, L. 1121-2, L. 1123-10, L. 1123-11, L. 5121-1, L. 5121-12, L. 5311-1, L. 5312-1, et R. 1123-64 ;

Vu la procédure contradictoire engagée avec les opérateurs concernés par courriers électroniques du 28 septembre 2020 ;

Vu les observations formulées par les opérateurs dans le cadre de cette procédure contradictoire le 30 septembre 2020 ;

Vu l’avis du Comité Scientifique Permanent « Sécurité et Qualité du médicament » de l’ANSM du 14 septembre 2020, confirmant les modalités de sécurisation des dons de selles au regard du risque de transmission du SARS-CoV-2 telles que définies dans la décision du 20 août 2020 fixant des conditions particulières de collecte des selles, de réalisation des préparations magistrales et hospitalières et de fabrication des médicaments, y compris expérimentaux, à partir de microbiote fécal dans la contexte de l’épidémie de COVID-19, tout en précisant les points suivants :

  • certains critères de sélection des candidats au don ou donneurs de selles,  
  • la fréquence de recherche du génome viral SARS-CoV-2 dans les selles et sur prélèvement nasopharyngé,

Considérant que des collectes de selles sont rendues nécessaires pour :

  • d’une part, la réalisation de préparations magistrales, définies au 1° de l’article L. 5121-1 du CSP comme « tout médicament préparé selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé en raison de l'absence de spécialité pharmaceutique disponible disposant d'une autorisation de mise sur le marché […], soit extemporanément en pharmacie, soit dans les conditions prévues à l'article L. 5125-1 ou à l'article L. 5126-6  »,
  • d’autre part, la réalisation de préparations hospitalières, définies au 2° de l’article L. 5121-1 du CSP comme « tout médicament, à l'exception des produits de thérapies génique ou cellulaire, préparé selon les indications de la pharmacopée et en conformité avec les bonnes pratiques mentionnées à l'article L. 5121-5, en raison de l'absence de spécialité pharmaceutique disponible ou adaptée […] par une pharmacie à usage intérieur d'un établissement de santé, ou par l'établissement pharmaceutique de cet établissement de santé  […] » ;
  • et enfin, la fabrication de médicaments destinés à être dispensés dans le cadre d’autorisation temporaires d’utilisation (ATU), telles que prévues à l’article L. 5121-12 du CSP, ou la réalisation de recherches impliquant la personne humaine (RIPH), telles que mentionnées à l’article L. 1121-1 du CSP, ou la fabrication de médicaments expérimentaux destinés à être dispensés dans le cadre de telles recherches ;

Considérant que par décisions des 13, 16, 24 mars et 20 août 2020, dans le contexte de l’épidémie de COVID-19 et en l’état des connaissances scientifiques à ces dates, le directeur général de l’ANSM a fixé respectivement des conditions de réalisation des essais cliniques de transplantation de microbiote fécal, des conditions particulières de collecte des selles, de réalisation et d’utilisation des préparations magistrales et hospitalière de microbiote fécal, et de dispensation des médicaments fabriqués à partir de microbiote fécal dans le cadre d’ATU  ;

Considérant que le virus SARS-CoV-2 peut être retrouvé dans les selles, et que la réplication du coronavirus dans le tube digestif est avérée ;

Considérant qu’en l’état actuel des connaissances scientifiques, le caractère infectieux du virus détecté dans les selles et le risque de transmission via une transplantation de microbiote fécal ne peuvent être écartés ;

Considérant toutefois que les mesures de sécurisation des dons décrites ci-dessous sont de nature à apporter des garanties suffisantes pour les patients concernés, en l’état actuel des connaissances scientifiques ;

Considérant en conséquence, au regard de l’ensemble de ce qui précède et dans le contexte actuel et anticipé de l’épidémie de Covid-19, qu’il y a lieu de permettre la collecte de selles, y compris dans le cadre de RIPH, ainsi que la réalisation des préparations magistrales et hospitalières, la fabrication de médicaments, y compris expérimentaux, à partir de microbiote fécal et la dispensation de ces produits , sous réserve d’une sélection préalable des donneurs et des dons de selles selon les modalités déterminées ci-dessous ;

 Décide :

Article 1er  
La collecte de selles, y compris dans le cadre de RIPH, ainsi que la réalisation des préparations magistrales et hospitalières et la fabrication de médicaments, y compris expérimentaux, à partir de microbiote fécal ainsi que leur dispensation sont autorisées dans les conditions définies ci-dessous.

Article 2
La sélection des donneurs de selles comporte, en sus de la sélection habituellement prévue :

1° une sélection clinique complémentaire consistant en :

  • un questionnaire spécifique pour l’évaluation du risque SARS-CoV-2 portant sur un éventuel antécédent d’infection documentée ou un éventuel contact avec un patient infecté, probable ou prouvé, dans les 28 jours précédant le don. En cas d’antécédent ou de contact, le candidat au don est exclu du don pendant 28 jours après la fin des symptômes ou le dernier contact ;
  • un examen clinique recherchant des symptômes compatibles avec une infection à SARS-CoV-2. En cas de symptômes, le candidat au don est exclu pendant 28 jours après la résolution des symptômes ;

2° une sélection biologique complémentaire comprenant une recherche du génome viral SARS-CoV-2 par amplification génique (RT-qPCR) sur un prélèvement nasopharyngé.

Lorsqu’un donneur effectue plusieurs dons sur une durée prédéterminée, le test devra être réalisé :

  • la veille ou le jour du premier don,
  • tous les 15 jours
  • puis lors du dernier don ; ce test devra être réalisé dans les 15 jours après le dernier test.

Dans le cas où le don est infructueux à la date prévue et reporté, il est nécessaire de réitérer le test PCR par prélèvement nasopharyngé la veille ou le jour du don.

Les donneurs positifs en RT-PCR nasopharyngée, symptomatiques ou non, sont exclus de la collecte pendant les 28 jours suivant le prélèvement ayant conduit au test positif. Si un donneur devient positif, les selles collectées dans les 15 jours qui précèdent ce résultat ne doivent pas être utilisées.

Article 3
Une recherche du génome viral SARS-CoV-2 par amplification génique (RT-qPCR) sur un échantillon des selles du donneur ou du transplant lui-même doit avoir été réalisée avant toute transplantation.

La méthode de détection du SARS-CoV-2 dans les selles doit répondre aux exigences suivantes :

  • utilisation d’une technique d’extraction marquée CE-IVD validée pour les selles ou à défaut validée par l’utilisateur,
  • utilisation d’une trousse/kit de détection RT-qPCR marquée CE-IVD permettant :
    • la détection d’au moins 2 gènes de SARS-CoV-2,
    • un contrôle d’extraction/inhibition type bactériophage MS2, étant donné la potentielle inhibition de la réaction de PCR sur les matrices selles.

Lorsque d’un donneur réalise plusieurs dons sur une durée prédéterminée, la recherche du génome viral SARS-CoV-2 dans les selles doit être effectuée en début, tout au long et a minima toutes les  semaines et en fin de la période de don.

La trousse/kit de détection marquée CE-IVD doit être validée et contrôlée par l’utilisateur avec la matrice fèces humaines ou une suspension de celles-ci.

Article 4
Des échantillons suffisants de sérum et de selles, prélevés en début et fin de collecte, sont conservés pour chaque donneur, dans le cas où les modalités futures de sécurisation des dons prévoiraient des tests supplémentaires.

Article 5
Les mesures de sécurisation précisées aux articles 2, 3 et 4 doivent être mises en œuvre dans les plus brefs délais. Pour les collectes et les administrations réalisées dans le cadre de recherches impliquant la personne humaine, ces mesures doivent être mises en œuvre sans délai puis suivies du dépôt de demandes de modifications substantielles des autorisations correspondantes, conformément aux dispositions de l’article L. 1123-10 du CSP.

Article 6
La décision du 20 août 2020 susmentionnée est abrogée.

Article 7
La directrice des médicaments génériques, homéopathiques, à base de plantes et des préparations ; le directeur des médicaments en oncologie, hématologie, transplantation, néphrologie, thérapie cellulaire, produits sanguins et radiopharmaceutiques ; le directeur adjoint des vaccins, des médicaments anti-infectieux, en hépato-gastroentérologie, en dermatologie, de thérapie génique et des maladies métaboliques rares, et la directrice des politiques d’autorisation et d’innovation sont chargés de l’exécution de la présente décision, qui sera publiée sur le site internet de l’ANSM.

Fait le 2 octobre 2020

Dominique MARTIN
Directeur général

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