La directrice générale de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ;
Vu la directive 93/42/CEE modifiée du Conseil du 14 juin 1993 relative aux dispositifs médicaux ;
Vu le règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux, modifiant la directive 2001/83/CE, le règlement (CE) n° 178/2002 et le règlement (CE) n° 1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil 90/385/CEE et 93/42/CEE
Vu la cinquième partie du code de la santé publique (CSP), notamment les articles L. 5211-1, L. 5211-3, L. 5211-2-1, L. 5311-1, L. 5312-1, L. 5312-2, L. 5312-3, R. 5211-1, R. 5211-4, R. 5211-17, R. 5211-21, R. 5211-34, R. 5211-65, et R. 5211-65-1;
Vu l’arrêté du 20 avril 2006 fixant les règles de classification des dispositifs médicaux, pris en application de l’article R.5211-7 du CSP ;
Vu l’arrêté du 15 mars 2010 fixant les conditions de mise en œuvre des exigences essentielles applicables aux dispositifs médicaux, pris en application de l’article R. 5211-24 du CSP ;
Vu l’arrêté du 15 mars 2010 fixant les modalités d’application des procédures de certification de la conformité définies aux articles R. 5211-39 à R. 5211-52, pris en application de l’article R. 5211-53 du CSP ;
Vu l’invitation à la conférence de presse du 11 février 2021 ;
Vu la déclaration du 1er février 2021 envoyée à l’ANSM par la société Pharma&Beauty–Centrepharma concernant le spray COV-Défense ;
Vu le dossier technique concernant le spray COV-Defense transmis le 11 février 2021 par la société Pharma&Beauty–Centrepharma ;
Vu les observations orales formulées par la société Pharma&Beauty–Centrepharma à l’occasion d’une conférence téléphonique en date du 18 février 2021 ;
Vu les observations écrites formulées par la société Pharma&Beauty–Centrepharma par courrier en date du 19 février 2021 ;
Considérant que le règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux susvisé entre en application à compter du 26 mai 2021, entrainant alors l’abrogation de la Directive 93/42/CEE susvisée ;
Considérant toutefois, que le point 5 de l’article 120 du règlement (UE) 2017/745 susvisé précise que « par dérogation [à la] directive […] 93/42/CEE, les dispositifs conformes au présent règlement peuvent être mis sur le marché avant le 26 mai 2021 » ;
Considérant que la société Pharma&Beauty–Centrepharma a, le 1er février 2021 et en application des articles L.5211-3-1 et R. 5211-65 du CSP, informé l’ANSM de la mise sur le marché du dispositif dénommé « Spray Nasal COV-Defense 30ml », pour lequel elle a déclaré avoir une activité de fabrication;
Considérant que la société Pharma&Beauty–Centrepharma fabrique et envisage de mettre sur le marché et de distribuer le spray nasal précité, dénommé « COV-Défense » ou « Biakomi », en tant que dispositif médical de classe I ;
Considérant que ce produit a été présenté lors d’une conférence de presse tenue le 11 février 2021, comme un "spray nasal qui évite la dissémination virale et diminue localement, par action mécanique, la charge virale de 99% en cas d’infection par le SARS-Cov2." ; qu’un modèle de notice présente également le produit ainsi « Performances attendues: Réduction du nombre de virus dans les cavités nasales par lavage. Assure l’inactivation du virus SARS-CoV-2 à plus de 99% *. *test in-vitro réalisé sur le virus SARS-CoV-2 après 30 secondes de temps de contact » ;
Considérant que par ces éléments, ainsi que par la dénomination « COV-Defense » le fabricant confère une revendication médicale anti-COVID à ce dispositif ; qu’il répond donc à la définition du dispositif médical telle que mentionnée à l’article L. 5211-1 du CSP ;
Considérant qu’en application des articles L. 5211-3 et R. 5211-17 du CSP, les dispositifs médicaux ne peuvent être notamment mis sur le marché et utilisés, s'ils n'ont reçu, au préalable, un certificat CE de conformité attestant leurs performances ainsi que leur conformité à des exigences de sécurité et de santé qui leurs sont applicables, et qu’ils doivent être conçus et fabriqués de manière à atteindre les performances revendiquées ; que cette démonstration, pour les dispositifs de classe I, relève de la seule responsabilité du fabricant ;
Considérant à cet égard que la société Pharma&Beauty–Centrepharma a établi une déclaration de conformité au règlement UE 2017/745 datée du 29 janvier 2021, pour le dispositif médical dénommé COV-Défense ; qu’elle y mentionne également le nom commercial « eau ionisée » ;
Considérant en premier lieu qu’en application des articles 5.3 et 61.1 du règlement UE 2017/745, « la démonstration de la conformité avec les exigences générales en matière de sécurité et de performances comprend une évaluation clinique », avec des « données pertinentes » apportant un « niveau de preuve clinique approprié » ;
Considérant que l’article 61.3 précise que l’évaluation clinique peut être fondée sur une évaluation critique des publications scientifiques pertinentes à condition que l’équivalence du dispositif faisant l’objet de l’évaluation clinique et du dispositif auquel se rapportent les données, soit démontrée ;
Considérant par conséquent qu’en l’absence d’une possibilité de démonstration par équivalence, il est attendu des données cliniques issues d’investigations cliniques menées sur le dispositif concerné ;
Considérant à cet égard que le dossier technique, dans sa partie 670 concernant l’évaluation clinique, d’une part mentionne qu’aucun dispositif équivalent n’a été identifié pour l’eau ionisée, d’autre part révèle non seulement que l’évaluation clinique porte uniquement sur des données de l’état de l’art et des données pré-cliniques, mais aussi qu’aucune investigation clinique n’a été réalisée;
Considérant par conséquent que l’évaluation clinique présentée ne répond pas aux exigences de la règlementation en vigueur ;
Considérant en second lieu que l’article 5 points 1 et 2 du règlement UE 2017/745 indique qu’un « dispositif est conforme aux exigences générales en matière de sécurité et de performances énoncées à l’annexe I qui lui sont applicables, compte tenu de sa destination » ; que la première exigence listée à l’annexe I dudit règlement indique « Les dispositifs atteignent les performances prévues par leur fabricant » ;
Considérant que le dossier technique transmis par la société Pharma&Beauty–Centrepharma, dans sa partie 650 concernant l’évaluation de la performance, indique que des tests in vitro ont été réalisés pour évaluer la performance de la substance « Active Water S100 » pour réduire le nombre de virus en particulier SARS-Cov2, selon la norme EN 14476+A2 : 2019, par le laboratoire IHU Méditerranée Infection ;
Considérant cependant que la norme NF EN 14476+A2 : 2019 « Antiseptiques et désinfectants chimiques - Essai quantitatif de suspension pour l'évaluation de l'activité virucide dans le domaine médical - Méthode d'essai et prescriptions (Phase 2/Étape 1) », spécifie une méthode d’essai de suspension permettant de déterminer si un antiseptique ou un désinfectant présente une activité virucide dans le traitement hygiénique et lavage des mains, la désinfection des instruments par immersion ou des surfaces par essuyage, pulvérisation , inondation ou autres moyens, ou encore la désinfection des textiles ;
Considérant ainsi qu’elle n’est ni conçue ni destinée à déterminer une potentielle action virucide d’un produit pulvérisé sur les fausses ou la muqueuse nasales ; qu’elle ne saurait donc à ce titre permettre d’évaluer et de démontrer la performance virucide d’un spray nasal ;
Considérant ainsi que ce test ne permet pas de valider la performance revendiquée en conditions réelles ;
Considérant par conséquent que les résultats des tests in vitro ne permettent pas de démontrer la performance du spray nasal dans la réduction de la charge virale en cas d’infection par le SARS-Cov2 ;
Considérant ainsi que les performances revendiquées par le fabricant ne sont donc pas garanties ;
Considérant au vu de l’ensemble de ce qui précède, que les dispositifs médicaux dénommés « spray nasal COV-Defense » et « spray nasal Biokami » ne sont donc pas conformes aux exigences générales de santé et de sécurité précitées ; qu’ils sont donc mis sur le marché, distribués et exportés en infraction avec les dispositions législatives et règlementaires qui leur sont applicables ; qu’ils sont susceptibles, en conséquence, de nuire à la santé des personnes ; qu’il convient donc de suspendre ces activités, ainsi que l’utilisation et la promotion des produits, jusqu’à leur mise en conformité avec la réglementation qui leur est applicable ;
Considérant enfin qu’un lot de 1600 produits a d’ores et déjà été mis sur le marché et distribué ; que l’utilisation de ce produit dans l’actuel contexte de pandémie étant de nature à compromettre directement l’intérêt de santé publique et des personnes qui en ont été destinataires, il convient d’en procéder au retrait ;
Considérant que le la société Pharma&Beauty–Centrepharma n’est pas en mesure d’apporter les éléments justifiant d’une démonstration de la performance de ce produit dans l’usage destiné contre le virus du SARS-CoV-2 ;
Considérant qu’il subsiste, dans l’esprit du grand public, un doute sur l’efficacité des produits dans la destination alléguée sur le virus du SARS-CoV-2, né des actions de communication de la société Pharma&Beauty–Centrepharma justifiant une action diligente, de surcroît dans un contexte pandémique ;
DECIDE
Article 1er : La mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux, la distribution, l’exportation, la publicité et l’utilisation des dispositifs médicaux désignés « spray nasal COV-Defense » et « spray nasal Biokami » fabriqués et mis sur le marché par la société Pharma&Beauty–Centrepharma sont suspendues jusqu'à leur mise en conformité avec la règlementation applicable.
Article 2 : La société Pharma&Beauty–Centrepharma est tenue de procéder au retrait des dispositifs visés à l’article 1er en tout lieu où ils se trouvent, ainsi qu’à la diffusion de la présente décision auprès de toutes les personnes physiques ou morales susceptibles de détenir les produits concernés par celle-ci.
Article 3 : Le Directeur des Dispositifs Médicaux, des Cosmétiques et des Dispositifs médicaux de Diagnostic in Vitro et le Directeur de l’inspection sont chargés chacun en ce qui le concerne de l’exécution de la présente décision qui sera publiée sur le site internet de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Fait le
Christelle RATIGNIER-CARBONNEIL
Directrice générale