L’Afssaps a mené une réévaluation des médicaments destinés à traiter la toux chez l’enfant de moins de deux ans. Une première phase a conduit en avril 2010 à contre-indiquer les médicaments mucolytiques, mucofluidifiants et l’Hélicidine® dans cette population. Cette démarche a ensuite porté sur les médicaments antihistaminiques de première génération ainsi que le fenspiride, dont la contre-indication chez le nourrisson vient d’être décidée et entrera en vigueur d’ici quelques mois. Il est de plus envisagé de contre-indiquer les suppositoires à base de dérivés terpéniques chez l’enfant de moins de trente mois.Le résultat de cette démarche de réévaluation conduit à proposer de nouvelles recommandations qui modifient en profondeur les modalités de prise en charge de la toux chez l’enfant de moins de deux ans.Dans ce contexte, l’Afssaps a élaboré plusieurs documents d’information, afin d’accompagner les professionnels de santé dans leur pratique et d’éclairer au mieux les parents.
Réévaluation des médicaments contre la toux chez le nourrisson
Mucolytiques, mucofluidifiants et l’Hélicidine®
La réévaluation de l’ensemble des médicaments indiqués dans la prise en charge de la toux chez le nourrisson (enfant de moins de 2 ans) a débuté en 2009 avec une enquête de pharmacovigilance axée sur l’examen des effets indésirables associés aux médicaments mucolytiques, mucofluidifiants et à l’Hélicidine®. Les conclusions de cette enquête ont conduit l’Afssaps à contre-indiquer en avril 2010 ces médicaments en raison des effets observés chez le nourrisson. Sur 70 cas rapportés de complications respiratoires liées à une aggravation de l'encombrement bronchique, plus de la moitié sont survenus chez des nourrissons de moins de 1 an, en raison de leur faible capacité à tousser pour éliminer les sécrétions produites.
Antihistaminiques
La réévaluation de la balance bénéfice/risque des autres médicaments de prise en charge de la toux et des troubles de la sécrétion bronchique chez le nourrisson, a été conduite en 2010. Elle concerne en particulier les antitussifs antihistaminiques H1 de première génération qui ont pour effet de bloquer le réflexe de toux.
Compte tenu des données évaluées tant au plan de l’efficacité qu’au plan de la pharmacovigilance, la Commission d’Autorisation de Mise sur le Marché a estimé que le rapport bénéfice/risque de ces médicaments était défavorable chez le nourrisson. En effet, le bénéfice attendu de ces spécialités ne permet pas de contrebalancer les risques. De plus, ces médicaments ont été associés dans certains cas à des complications neuropsychiatriques (ex : convulsions) ou à des dépressions respiratoires lors de leur utilisation chez les enfants. Il existe en particulier, un risque de potentialisation de l’effet sédatif chez le nourrisson, qui pourrait être délétère en cas d’encombrement bronchique.
En conséquence, les sirops et suspensions buvables d'antihistaminiques H1 de première génération ainsi que le fenspiride, utilisés dans le traitement de la toux, seront prochainement contre-indiqués chez le nourrisson, comme cela est déjà le cas dans d’autres pays européens et outre Atlantique.
La mise en application de ces décisions interviendra à la mi-mars 2011. Comme cela a été le cas dans certains pays étrangers, ce délai d’entrée en vigueur de la décision permettra de laisser aux familles comme aux professionnels de santé, le temps nécessaire pour assimiler les nouvelles recommandations, qui modifient en profondeur la prise en charge de la toux chez le nourrisson.
Terpéniques
En raison du risque possible de convulsions, il est envisagé de contre-indiquer toutes les spécialités suppositoires terpéniques chez les enfants de moins de 30 mois, de même que chez les enfants ayant des antécédents de convulsion fébrile ou de crise d’épilepsie quel que soit leur âge. Compte tenu de la diversité des positions prises au sein de l'Union Européenne sur ce sujet, l'Afssaps vient de demander une réévaluation à l'échelon européen, afin qu'une position harmonisée puisse être fixée.
Ce risque convulsif a déjà conduit depuis 1996 à contre-indiquer les médicaments terpéniques appliqués par voie cutanée et par voie nasale, chez les enfants de moins de 30 mois ainsi que chez les enfants ayant des antécédents de convulsion fébrile quel que soit leur âge.
Nouvelles modalités de prise en charge de la toux
Dans le contexte de la réévaluation des médicaments indiqués dans la prise en charge de la toux et des troubles de la sécrétion bronchique chez le nourrisson, un groupe d’experts, en collaboration avec la Société Française de Pédiatrie, la Société Pédiatrique de Pneumologie et d’Allergologie et le groupe de travail référent des médecins généralistes de l’Afssaps, a redéfini les modalités de prise en charge de la toux aiguë du nourrisson.
Il en résulte de nouvelles recommandations qui modifient profondément la conduite à tenir face à un nourrisson qui tousse.
La toux aiguë du nourrisson est un symptôme fréquent. Elle est le plus souvent liée à une simple infection virale des voies respiratoires (rhinopharyngite, bronchite). Il s’agit d’un réflexe naturel et indispensable de défense de l’organisme qui permet de drainer les voies respiratoires.
Au cours de leurs 2 premières années de vie, les nourrissons en bonne santé feront de fréquents épisodes d’infection des voies respiratoires associée à une toux. Dans la majorité des cas, la toux disparaîtra dans un délai de 10 à 15 jours. Dans certains cas, elle pourra régresser plus lentement en 3 à 4 semaines sans pour autant être liée à une complication, qu’il conviendra cependant d’éliminer.
Elle constitue un motif très fréquent de consultation, surtout durant la période automno-hivernale, et son apparente banalité ne doit pas dispenser d’une démarche diagnostique.
Dans le cadre d’une consultation survenant dans les premiers jours d’une toux aiguë, et après s’être assuré que celle-ci se manifeste à l’occasion d’une banale infection des voies aériennes, il est indispensable d’expliquer aux parents que seules des mesures simples sont nécessaires pour la prise en charge de cette toux aiguë banale et que celle-ci peut durer 10 à 15 jours. Il faut les informer sur les symptômes et signes qui doivent les inciter à consulter à nouveau : persistance et aggravation de la toux, fatigue, fièvre d’apparition secondaire, changement de comportement du nourrisson, aggravation ou apparition d’une gène respiratoire, vomissements répétés au cours ou au dehors des repas, forte baisse de la ration alimentaire (en dessous de 50%).
Préconiser les mesures hygiéno-diététiques
- Désobstruction nasale pluriquotidienne au sérum physiologique en cas d’encombrement nasal.
- Eviction de l’exposition au tabac (ne pas fumer au domicile y compris dans une autre pièce que celle où dort le nourrisson).
- Hydratation régulière du nourrisson et limitation de la température à 19-20°C dans la chambre.
Ne pas prescrire d’antitussifs en cas de toux aiguë banale du nourrisson
- Les mucolytiques, les mucofluidifiants et l’hélicidine sont contre-indiqués chez le nourrisson.
- Les sirops antihistaminiques H1 de première génération utilisés dans le traitement de la toux seront prochainement contre-indiqués chez le nourrisson.
- Il est, en outre, envisagé de contre-indiquer le fenspiride chez le nourrisson et les suppositoires à base de dérivés terpéniques chez les enfants de moins de 30 mois.
- Les sirops antitussifs à base d’opiacés, sont contre-indiqués chez les nourrissons en raison de leur effet dépresseur respiratoire. En aucun cas, les antalgiques opioïdes de forme pédiatrique ne doivent être utilisés pour traiter la toux chez le nourrisson.
- Aucun traitement d’aucune autre nature n’a fait la preuve de son efficacité ; la prise de miel n’est pas recommandée chez les enfants de moins d’un an.
Rappel pour les autres médicaments
- Les antipyrétiques peuvent éventuellement être prescrits en cas de fièvre associée et mal supportée.
- Les bronchodilatateurs inhalés ne sont pas recommandés chez un nourrisson non asthmatique.
- Les antibiotiques sont non seulement sans effet, et susceptibles de développer des résistances à n’importe quel stade de l’évolution d’une rhinopharyngite simple. Ils sont également inefficaces sur la durée de la toux dans cette situation.
- Les corticoïdes par voie générale ou par voie inhalée ne sont pas recommandés en cas de toux aiguë en rapport avec une rhinopharyngite, une pharyngite, une laryngite non dyspnéïsante, une trachéite, une bronchite, et au cours du premier ou du deuxième épisode de bronchiolite aiguë du nourrisson.
- Les antisécrétoires gastriques sont sans effet en l’absence d’un reflux gastro-oesophagien clairement identifié.
- En cas de coqueluche, une antibiothérapie à base de macrolides doit être instaurée rapidement.
- Les médicaments par voie orale, inhalée, nasale ou en application cutanée contenant des dérivés terpéniques (ex : camphre, eucalyptol, etc.) sont contre-indiqués chez les nourrissons et les enfants âgés de moins de 30 mois en raison de leur risque neurologique, en particulier convulsivant, chez les enfants en bas âge.
Kinésithérapie respiratoire
- Il n'est pas nécessaire de prescrire de la kinésithérapie respiratoire face à une toux aiguë liée à une infection banale des voies respiratoires, non compliquée.
- En revanche, la kinésithérapie respiratoire doit être discutée au cas par cas dans la bronchiolite.
Un dispositif d’information pour les professionnels et le public |
L’Afssaps a élaboré plusieurs documents d’information, afin d’accompagner les professionnels de santé dans leur pratique et d’éclairer au mieux les parents. Une mise au point (27/10/2010) (144 ko) intitulée « Prise en charge de la toux aiguë chez le nourrisson de moins de deux ans » a été adressée par courrier aux médecins généralistes, aux pédiatres et aux kinésithérapeutes. Compte tenu de la large utilisation de ces médicaments destinés à traiter la toux et de ces nouvelles recommandations, il est également apparu nécessaire de bien informer les parents. A cet effet, l’Afssaps a élaboré plusieurs outils :
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