Nous observons une augmentation du mésusage de la prégabaline au cours des dernières années. Afin de limiter ce mésusage et les risques associés, la durée de prescription des médicaments à base de prégabaline (Lyrica et génériques) est limitée à 6 mois et nécessitera une ordonnance sécurisée . Cette mesure entrera en vigueur le 24 mai 2021.
La prégabaline est un médicament indiqué dans la prise en charge des douleurs neuropathiques, de certaines formes d’épilepsie et du trouble anxieux généralisé. Les dernières enquêtes du réseau des centres d’addictovigilance (CEIP-A[i] ) montrent une augmentation importante des cas d’addiction et d’abus de la prégabaline ainsi que des risques qui y sont associés :
- 234 déclarations de cas d’abus, de dépendance et d’usage détourné en 2019, contre 106 en 2018 et 18 déclarations en 2016.
- Les personnes sont majoritairement des hommes jeunes (27 ans en moyenne) dont des mineurs en situation de précarité, et parfois en détention ou centres de rétention administrative.
- L’usage détourné est essentiellement à visée de défonce/euphorie dans un contexte de polyconsommation de substances psychoactives, mais aussi à visée anxiolytique, antalgique ou hypnotique. Dans plus de la moitié des cas, elle est ainsi associée à une autre substance, majoritairement une benzodiazépine (65 %), en particulier le clonazépam.
- La prégabaline est obtenue illégalement dans près de la moitié des cas (ordonnance falsifiée, nomadisme ou deal/achat de rue).
- Dans l’enquête OSIAP[ii] , 429 déclarations d’ordonnance falsifiée ont été collectées en 2019 (contre 226 en 2018 et 26 en 2016 : la prégabaline devient la première substance faisant l’objet d’ordonnance falsifiée.
- La prégabaline apparait impliquée dans des décès liés à l’usage de drogues, toujours en association avec d’autres substances (enquête DRAMES[iii] ). Elle apparait également impliquée dans des décès liés à l’utilisation d’antalgiques (enquête DTA[iv] ).
- En 2019, elle apparait pour la première fois comme le premier produit ayant entrainé une dépendance chez des usagers de drogues (enquête OPPIDUM[v] ).
Risques et complications associés à la prégabaline
Les principales complications liées au mésusage de la prégabaline sont un coma, des troubles de la conscience, une désorientation, une confusion.
Par ailleurs, des cas d'insuffisance respiratoire, de coma et de décès ont également été rapportés chez des patients traités par prégabaline et opioïdes et/ou d’autres médicaments dépresseurs du système nerveux central. La prégabaline pourrait diminuer le seuil de tolérance aux opioïdes, ce qui entrainerait un risque augmenté de dépression respiratoire et de décès liés aux opioïdes.
Informations pour les professionnels de santé
A compter du 24 mai, la prégabaline devra obligatoirement être prescrite sur une ordonnance sécurisée . Elle ne pourra être renouvelée en pharmacie que 5 fois sur mention du prescripteur, permettant une délivrance de 6 mois de traitement maximum. Si nécessaire, une nouvelle visite médicale sera à prévoir tous les 6 mois.
Nous rappelons aux professionnels de santé que :
- la posologie doit être diminuée progressivement avant l’arrêt du traitement pour éviter un syndrome de sevrage,
- la prégabaline doit être délivrée dans les plus petits conditionnements possibles, adaptés à la prescription,
- toute prescription concomitante de prégabaline avec des opioïdes doit être effectuée avec précaution,
- chez les patients présentant un risque de mésusage, un report vers la gabapentine (Neurontin et générique), un autre gabapentinoïde, doit être surveillé et signalé le cas échéant à votre CEIP-A.
Informations pour les patients
- Votre traitement sera prescrit sur une ordonnance spécifique dite « sécurisée » et devra faire l’objet d’une nouvelle prescription tous les 6 mois si votre médecin le décide.
- Respectez la posologie indiquée sur l’ordonnance, ainsi que la durée de traitement.
- Si vos symptômes ne sont pas suffisamment ou rapidement soulagés par votre traitement, consultez de nouveau votre médecin. N’augmentez pas la dose ou la durée du traitement sans l’avis de votre médecin.
- Vous ne devez pas arrêter brusquement votre traitement : votre médecin ou pharmacien vous indiquera la démarche qui consiste à réduire progressivement les doses.
Pour déclarer tout effet indésirable, abus, dépendance, usage détourné : signalement-sante.gouv.fr Si vous avez des questions sur les risques liés à la prégabaline, vous pouvez contacter le centre d’addictovigilance (CEIP-A) de votre région . |
Lire aussi
- CR du CSP Psychotropes, Stupéfiants et des addictions du 1er octobre 2020
- Rapport d’addictovigilance sur la prégabaline du CEIP-A de Toulouse de septembre 2020 (24/02/2021) (2031 ko)
- Point d’information de 2016
- Enquête OSIAP 2019
[i]
Centres d’Evaluation et d’Information sur la pharmacodépendance - Addictovigilance
[ii]
Ordonnances suspectes – Indicateurs d’Abus Possible
[iii]
Décès en Relation avec l’Abus de Médicaments Et de Substances
[iv]
Décès Toxique par Antalgiques
[v]
Observation des Produits Psychotropes Illicites ou Détournés de leur Utilisation Médicamenteuse