DHEA : synthèse des données disponibles

10/07/2001

Bernard Kouchner, Ministre délégué à la santé, a demandé à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) de rassembler et d'étudier les données disponibles concernant les effets bénéfiques de la DHEA et les risques éventuellement liés à son association, ainsi que le statut juridique de ce produit.

L’Afssaps a réuni, le 3 juillet 2001, un groupe d’experts sous la présidence du Pr. Charles Caulin, président de la commission d’autorisation de mise sur le marché, pour évaluer les données expérimentales, cliniques et épidémiologiques actuellement disponibles sur la DHEA. Au cours de la réunion, le Pr. Baulieu a pu présenter les informations les plus récentes sur le sujet.

La DHEA est un précurseur d’hormones sexuelles masculine (testostérone) et, à moindre degré, d’hormones féminine (estradiol). Il n’a pas été établi à ce jour une activité pharmacologique directe de la DHEA.

En ce qui concerne l’utilisation de la DHEA dans la lutte contre le vieillissement, les experts ont considéré que, dans les études disponibles y compris l'étude DHEAge, les preuves de son efficacité sont insuffisantes. Les propriétés prêtées à la DHEA n’ont pas été établies de façon indiscutable et des essais complémentaires doivent encore être menés.

Au plan de la sécurité, aux doses inférieures ou égales à 50 mg, il n’a pas été observé d’effets indésirables cliniques majeurs. Deux points ont pourtant retenu l'attention des experts. L’utilisation de la DHEA s'est accompagnée, dans plusieurs études, et même à faible doses, d'une diminution du cholestérol HDL ("bon" cholestérol) ; la DHEA est donc susceptible d'augmenter le risque de maladie cardio-vasculaire. Par ailleurs, du fait de sa transformation hormonale, elle peut favoriser ou aggraver les cancers hormonodépendants. Ces risques potentiels sont susceptibles d’être plus importants en cas d’augmentation des doses ou de la durée du traitement.

D’autre part, la DHEA a montré un intérêt potentiel dans le cas très particulier des insuffisances surrénaliennes et fait l’objet d’un programme de développement clinique avancé dans le traitement du lupus.

Au vu de l’analyse du groupe d’experts, l’Afssaps considère que l’utilisation de la DHEA doit être assujettie à la réglementation du médicament et qu’une information des professionnels de santé et du public doit être faite (rapport scientifique disponible sur le site de l'agence http://www.afssaps.fr (03/07/2001) application/pdf (53 ko)).

Compte tenu du contexte d’utilisation de la DHEA aujourd’hui, il est nécessaire de souligner les points suivants :

  • la prise de DHEA peut stimuler la croissance de cancers hormonodépendants (prostate, sein, utérus,) ;
  • le risque cardio-vasculaire potentiel, lié à une baisse de l’HDL cholestérol, observé dans plusieurs études, doit être pris en considération notamment en cas de prise au long cours de DHEA ;
  • chez la femme ménopausée, le bénéfice du traitement hormonal substitutif oestro-progestatif est démontré. Ce type de traitement ne doit en aucun cas être abandonné au profit d'un traitement par la DHEA dont les effets sont incertains. Ces deux traitements ne doivent pas être associés pour éviter un surdosage en œstrogène ;
  • chez l’homme âgé, l'absence d'indice en faveur d'un bénéfice de la DHEA peut s'expliquer par le maintien d'une sécrétion testiculaire de testostérone. De plus, il existe un risque potentiel de développement de cancer de la prostate.

Pour toutes ces raisons, il ne peut être conseillé de prescrire la DHEA dans le cadre de la lutte contre les effets du vieillissement, quel que soit l'âge et le sexe. L'utilisation éventuelle de ce précurseur hormonal n'est donc pas justifiée en dehors des essais thérapeutiques ou de situations cliniques très particulières à juger au cas par cas. La DHEA nécessite une prescription et une surveillance médicale. En l'absence de spécialité pharmaceutique ayant une AMM, la préparation magistrale reste possible, délivrable uniquement sur ordonnance.

L'Afssaps poursuit l'évaluation de la qualité de la DHEA, notamment pour vérifier qu’elle est exempte de certaines impuretés potentiellement toxiques dont la présence dépend du mode de production.

L’Afssaps continue l’évaluation de l'efficacité et de la sécurité d'emploi de la DHEA au fur et à mesure des éléments nouveaux susceptibles d'apparaître.

Contacts : Isabelle Vernhes Patricia Logghe-Jewkes 01 55 87 30 18 - isabelle.vernhes@afssaps.sante.fr - patricia.logghe-jewkes@afssaps.sante.fr