Maladie de Creutzfeldt-Jakob

19/12/2000

Saint-Denis, 19 décembre 2000

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a réuni à Saint-Denis, le 17 novembre 2000, un groupe d'experts multidisciplinaire afin de réviser les mesures de réduction du risque de transmission du nouveau variant de la Maladie de Creutzfeldt-Jakob (nv-MCJ) par les produits sanguins. A partir des conclusions du précédent rapport de février 2000 et des données scientifiques les plus récentes, le groupe d'experts a procédé à une analyse de risque des différents produits sanguins, et évalué l’ensemble des options susceptibles de le réduire.

L'avis du groupe d'experts ainsi que les décisions qui seront mises en œuvre sont rendus publics le 19 décembre 2000.

Il n’existe pas à ce jour, de cas de transmission de nv-MCJ par le sang ou ses dérivés chez l’Homme. Le risque de transmission de la nv-MCJ par le sang est donc un risque théorique. La présence d’infectiosité dans le sang n’a pas pu être mise en évidence jusqu’à présent. Cependant, compte tenu de l’émergence récente de cette nouvelle variante, le recul n’est pas suffisant pour exclure ce risque. Pour évaluer ce risque théorique et proposer des mesures adaptées, le groupe d’experts a posé des hypothèses : d’une part pour le nombre de sujets potentiellement en incubation de la maladie et d’autre part quant à l’existence d’un certain niveau d’infectiosité dans le sang. Ces hypothèses qui maximalisent volontairement le niveau de risque ont permis d’estimer et de comparer la marge de sécurité, vis-à-vis de ce risque théorique, des différents produits sanguins.

L’analyse de risque a également pris en compte les facteurs de réduction apportés par les procédés de préparation et les doses maximales annuelles reçues par un patient.

Pour chaque paramètre pris en compte, ce sont les hypothèses correspondant au niveau de risque le plus élevé qui ont été volontairement retenues. Sous ces hypothèses, l’analyse a permis de positionner sur une échelle de risque les produits sanguins labiles (PSL : concentrés de globules rouges, concentrés de plaquettes, plasma thérapeutique) et les médicaments dérivés du sang (MDS : facteurs de coagulation, immunoglobulines, albumine).

Sur la base de ces hypothèses, les PSL apparaissent comme les produits dont les facteurs de sécurité sont les plus faibles. Toutefois, l’existence de ce risque dépend du niveau d’infectiosité du sang des personnes incubant la maladie. Ce risque s’il existe, serait faible compte tenu du faible nombre de cas de nv-MCJ dans les 60 ans à venir.

Les MDS, fabriqués à partir du plasma, subissent, eux, au cours du fractionnement, un certain nombre d'étapes qui augmentent d'autant leur niveau de sécurité.

Les experts ont considéré que le bénéfice thérapeutique apporté par les PSL, utilisés dans des indications mettant en jeu le pronostic vital, reste supérieur à un risque potentiel. Le recours à l'importation de produits sanguins labiles n'a pas été retenu par les experts, indépendamment du fait que cette option aurait été difficile, voire impossible, à mettre en place de façon satisfaisante.

Les experts recommandent le maintien de l'ensemble des MDS car aucun d'entre eux n'a été jugé comme présentant un risque de nature à proposer son interdiction, compte tenu du niveau de sécurité résultant des procédés de fabrication.

Les actions

Sur la base des recommandations des experts, les mesures suivantes destinées à augmenter la marge de sécurité des produits vis-à-vis du risque nv-MCJ seront mises en œuvre :

Concernant l’exclusion des donneurs ayant séjourné en GB entre 1980 et 1996

La majorité des membres du groupe d’experts a estimé que l’évaluation réalisée dans le rapport de février 2000 était toujours pertinente quant aux niveaux relatifs d’exposition au risque ESB dans les îles britanniques et en France et quant à la recommandation faite de ne pas exclure du don les personnes ayant séjourné de façon prolongée en Grande Bretagne entre 1980 et 1996. Ils ont notamment indiqué que " à l’échelle de la population et compte tenu du faible nombre attendu de cas, cette mesure peut donc être jugée peu efficace et non proportionnée ". Cependant, certains membres ont fait valoir que " au plan individuel (en réalité porté par un individu), un séjour prolongé dans les îles britanniques dans la période considérée (1980–1996) se traduit par un niveau de risque supérieur à celui de la population française et que l’exclusion de ces donneurs devrait être proposé au moins pour la préparation de produits sanguins labiles qui ne possèdent pas la marge de sécurité des médicaments dérivés du sang ".

Toutefois, pour l’évaluation de ce sur-risque, le groupe d’experts signale que " compte tenu du risque estimé dans la population française, cette augmentation ne devient cependant notable que pour un séjour prolongé (un an ou plus) ".

Ainsi, même si le bénéfice d’une telle mesure reste limité en terme de réduction globale du risque, l’exclusion des donneurs ayant séjourné dans les îles britanniques pour une durée de plus d’un an entre 1980 et 1996 a été proposée par l’Afssaps au titre d’une mesure d’extrême précaution notamment pour les produits sanguins labiles.

Produits sanguins labiles
  • rappel du strict respect des indications des produits pour restreindre leur utilisation aux seules situations où le recours à la transfusion est incontournable ;
  • recours chaque fois que possible aux alternatives disponibles dans la prise en charge des patients nécessitant une transfusion de concentrés de globules rouges ;
  • actualisation des recommandations sur les indications des PSL et des alternatives à la transfusion (au cours du premier semestre 2001) et analyse des alternatives à la transfusion dans la prise en charge ;
  • extension de la déleucocytation de l'ensemble des PSL, actuellement en cours de mise en œuvre par l'Etablissement français du sang ;
  • conduite d’études pour réduire le risque potentiel associé aux concentrés plaquettaires et au plasma frais congelé.
Médicaments dérivés du sang

Pour répondre à l’attente de patients pour lesquels la perception du risque reste forte, il a été décidé de faciliter la mise à disposition des prescripteurs, des MDS préparés à partir de plasmas prélevés dans des pays à moindre risque d’exposition à l’ESB et des produits recombinants lorsqu’ils existent. Ainsi, pour le Facteur VIII, les produits d’importation et bénéficiant d’AMM en France, verront leur disponibilité sur le marché français renforcée. De plus, le facteur VIII actuel du LFB sera remplacé dès fin janvier 2001 par un Facteur VIII nanofiltré dont la marge de sécurité est augmentée. Ceci permettra aux prescripteurs et aux patients de faire le choix du traitement le plus adapté à la situation et aux attentes propres à chaque patient.

D’autres actions seront également mises en œuvre pour les MDS :

  • mise en place des études de validation pour identifier des étapes contribuant à améliorer la marge de sécurité des produits;
  • mise en place d'étapes supplémentaires de purification dans le processus de fabrication de ces produits ;
  • mise à disposition des médicaments dérivés du sang pour lesquels la nanofiltration sera opérationnelle courant 2001.

L'Afssaps, en concertation avec les autorités sanitaires, adressera, dans les prochaines semaines, une information aux prescripteurs sur cette évaluation du risque de transmission du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (nv-MCJ) par les produits sanguins, ainsi que sur les mesures prises. Cette lettre aux prescripteurs soulignera l'importance du strict respect des indications de ces produits pour une prise en charge médicale adaptée à la situation de chaque patient. Cette lettre permettra aussi l’information actualisée des prescripteurs pour qu’ils maintiennent la meilleure information à leurs patients.

Contact : presse@ansm.sante.fr