Utilisation et sécurité d'emploi de la mitoxantrone dans la sclérose en plaques

28/07/2003

Lettre aux professionnels de santé (neurologues et hématologues dans les établissements de santé)

Madame, Monsieur, Cher(e) Confrère,

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) souhaite faire le point sur la sécurité d'emploi de la mitoxantrone prescrite chez des patients atteints de sclérose en plaques. La mitoxantrone est autorisée depuis 1985 et indiquée en hématologie et en cancérologie (NovantroneÒ).

Cinq cas de leucémie aiguë myéloïde (LAM) ont été rapportés, en France, chez des patients traités au cours des 4 dernières années pour sclérose en plaques. Ces cas concernent des patients âgés de 30 à 49 ans, chez lesquels la leucémie a été diagnostiquée dans un délai allant de 20 à 39 mois après exposition au produit. Dans 2 cas, l'évolution a été rapidement fatale. Deux autres patients sont en rémission, dont un en attente de greffe. Le dernier cas a été récemment identifié. Deux autres cas ont été observés au plan mondial.

L'Afssaps a évalué les données d'efficacité et de sécurité disponibles, dans la perspective d'une indication portant sur le traitement de formes agressives de sclérose en plaques. L'agressivité est définie par 2 poussées l'une et l'autre avec séquelles au cours des 12 derniers mois et une nouvelle lésion rehaussée par le gadolinium sur une IRM datée de moins de 3 mois ou par une progression de 2 points à l'EDSS au cours des 12 mois précédents et une nouvelle lésion rehaussée par le gadolinium sur une IRM datée de moins de 3 mois.

Compte tenu du profil de toxicité de la mitoxantrone qui associe :

  • une toxicité hématologique aiguë ou subaiguë (leucopénie, neutropénie, thrombocytopénie),
  • une toxicité hématologique à distance se manifestant par la survenue de leucémies aigües myéloïdes, généralement d'apparition rapide sans phase pré-leucémique, et qui peuvent se développer jusqu'à 15 ans après exposition au produit,
  • une cardiotoxicité dose-dépendante et cumulative, pouvant être aiguë (troubles du rythme auriculaire et/ou ventriculaire), subaiguë (myocardites) et chronique (insuffisance cardiaque par altération du tissu myocardique),
  • un risque de stérilité définitive chez l'homme et chez la femme,

L'Afssaps émet à ce jour les recommandations suivantes :

1. Information aux patients

Une information éclairée sur le profil de toxicité de la mitoxantrone (notamment hématologique, cardiaque et risque de stérilité définitive) devra être délivrée au patient.

2. Recommandations de surveillance

  • une numération formule sanguine ainsi qu'un taux de plaquettes devront être effectués avant et au cours du traitement. En cas de neutropénie ou de thrombocytopénie, le traitement sera différé jusqu'au retour aux valeurs antérieures.
  • un suivi trimestriel hématologique de tous les patients doit être engagé pendant au moins 5 ans après l'arrêt du traitement et une surveillance clinique au-delà (risque de Leucémie Myéloïde Aiguë ).
  • une mesure de la fraction d'éjection ventriculaire par échocardiographie avant initiation de la mitoxantrone, à la fin du traitement puis tous les ans pendant 5 ans.
  • la nécessité d'une contraception efficace chez la femme (jusqu'à 3 mois après l'arrêt du traitement) et chez l'homme (jusqu'à 6 mois après l'arrêt du traitement).
  • Des tests de grossesse plasmatiques chez les femmes en âge de procréer à effectuer avant l'instauration du traitement, pendant la durée du traitement et 3 mois après l'arrêt.

Enfin l'Afssaps rappelle que tout effet indésirable grave ou inattendu doit être déclaré aux centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) dont les listes figurent sur le site Internet

Je vous prie d'agréer, Madame, Monsieur, Cher(e) Confrère, l'expression de mes salutations distinguées.

Philippe Duneton
Directeur général de l’Afssaps