Produits de contraste contenant du gadolinium, valproate, docétaxel : retour d’information sur le PRAC de mars 2017 - Point d'information

27/03/2017
Lors de sa réunion mensuelle, qui s’est tenue du 6 au 9 mars 2017 à Londres, le Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) a finalisé l’arbitrage concernant les produits de contraste contenant du gadolinium, engagé une nouvelle évaluation concernant l’utilisation du valproate chez les femmes enceintes et en âge de procréer et lancé une évaluation d’un signal de pharmacovigilance pour docétaxel.
Réévaluation du rapport bénéfice/risque des produits de contraste contenant du gadolinium

Le PRAC a recommandé la suspension des Autorisations de Mise sur le Marché (AMM) de quatre produits de contraste à base de gadolinium de type linéaire en raison de données montrant un dépôt de gadolinium dans le cerveau notamment, sans conséquence clinique rapportée à ce jour.

Les produits concernés sont :

  • Omniscan® (gadodiamide) 
  • Optimark® (gadoversetamide) 
  • Magnevist® (gadopentate)
  • Multihance® (acide gadobénique)

Pour rappel, les produits de contraste contenant du gadolinium sont utilisés à visée diagnostique afin d’améliorer le contraste des images lors des procédures d'Imagerie par Résonance Magnétique (IRM). Ils sont administrés par voie intraveineuse avant ou pendant l’IRM.

Il existe deux types de produits à base de gadolinium : les « linéaires » ci-dessus cités, et les « macrocycliques » ci-après listés qui ne sont pas concernés par cette recommandation du PRAC :

  • Prohance® (gadoteridol)
  • Gadovist® (gadobutrol)
  • Dotarem®, Artirem® (acide gadotérique)

Les données animales et cliniques actuellement disponibles montrent que le gadolinium s’accumule dans les tissus, notamment le foie, les reins, les muscles, la peau et les os. Plusieurs articles de la littérature ont montré que le gadolinium s’accumule également dans le cerveau. En janvier 2016, après discussion de ces articles par le PRAC, et bien qu’aucun cas d’effet indésirable en lien avec ces dépôts dans le cerveau n’a été identifié à ce jour, le comité a jugé nécessaire de revoir attentivement ces données et le profil global de sécurité de ces produits de contraste. Par conséquent, le PRAC a démarré en mars 2016, en accord avec la Commission européenne (article 31), une revue des données disponibles sur l’accumulation du gadolinium dans les tissus et ses conséquences cliniques, afin de déterminer si celle-ci a un impact sur le rapport bénéfice/risque de ces produits utilisés pour l’imagerie IRM.

En mars 2017, à l’issue de cette réévaluation, le PRAC a recommandé par mesure de précaution la suspension de l’AMM des quatre produits de contraste de type linéaire suivants : Omniscan®, Optimark®, Magnevist® en intra-veineux et Multihance® dans toutes leurs indications. Le PRAC a considéré que sur la base des études disponibles, et en dépit de données limitées sur les effets à long terme, il y avait suffisamment de preuve sur le risque d’accumulation du gadolinium dans le cerveau après injection des produits de contraste contenant du gadolinium lors des procédures d’IRM, et que les produits de type linéaire avaient une structure plus favorable à telle accumulation dans les tissus organiques.

Les produits de type macrocyclique étant plus stables et ayant une propension à libérer le gadolinium inférieure, le PRAC ne recommande pas la suspension de leur AMM, mais demande à ce qu’ils soient utilisés à la dose la plus faible améliorant suffisamment les images pour permettre le diagnostic, et seulement lorsqu’une imagerie sans agent de contraste n’est pas adaptée.

Parmi les produits de type linéaire, le PRAC recommande que deux produits restent disponibles : l’acide gadoxétique (Primovist®, pas d’AMM en France), utilisé à faibles doses pour l’imagerie du foie et pour laquelle il existe très peu d’alternatives, et le gadopentate (Magnevist®) en intra-articulaire dont la concentration en gadolinium est très faible (environ 200 fois plus faible que pour les produits en intra-veineux).

Information pour les patients

L’ANSM note qu’aucune conséquence clinique consécutive à ces dépôts de gadolinium dans le cerveau à l’issue de procédures d’IRM n’a été rapportée à ce jour et que la recommandation du PRAC concernant les 4 produits précités est une mesure de précaution. Il est rappelé qu’il existe des alternatives à ces produits sur le marché français.  

Information pour les professionnels

Dans l’attente de la décision de la Commission européenne, l’ANSM demande aux prescripteurs de prendre en compte ces informations avant toute utilisation de produits de contraste dans le cadre des IRM et rappelle qu’il existe des alternatives, notamment de structure macrocyclique, disponibles en quantités suffisantes et qui doivent être utilisées à la dose la plus faible possible et uniquement si nécessaire. 

Démarrage d’une procédure d’arbitrage sur l’utilisation du valproate et dérivés au cours de la grossesse et chez les femmes en âge de procréer (article 31)

Le valproate est indiqué dans le traitement de l’épilepsie (Dépakine® , Micropakine®,  et génériques) et en deuxième intention dans les épisodes maniaques du trouble bipolaire (Dépakote®  et Dépamide® ). Il est également indiqué dans certains pays de l’UE dans la migraine. Cette dernière indication n’est pas autorisée en France.

Suite à la réévaluation européenne du rapport bénéfice/risque des produits à base de valproate qui s’est finalisée fin 2014, des mesures pour minimiser les risques malformatifs et neuro-développementaux liés à une exposition in utero  au valproate ont été mises en place dans les différents états membres de l’Union Européenne.

Malgré ces mesures de minimisation du risque recommandées par le PRAC et la mise en place de mesures additionnelles au niveau national,  les conditions de prescription et de délivrance en France ne sont pas respectées dans un nombre important de cas, selon les résultats d’une enquête nationale qui a été conduite en 2016 à la demande de l’ANSM auprès de pharmacies d’officine afin d’évaluer la mise en application des nouvelles conditions de prescription et de délivrance du valproate (présentation d’un formulaire d’accord de soin et d’une ordonnance d’un spécialiste datant de moins de 1 an).

De plus, les résultats d’une étude de cohorte rétrospective réalisée à partir des données du SNIIRAM, analysant l’exposition à l’acide valproïque et ses dérivés au cours de la grossesse en France, mettent en évidence la persistance d’un niveau élevé d’exposition à l’acide valproïque parmi les femmes en âge de procréer au cours de la période récente.

Dans ce contexte, la France a déclenché un arbitrage selon l’article 31 de la directive  2001/83/CE afin qu’au niveau européen :

  • d’une part, soit discutée la nécessité de contre-indiquer, au cours de la grossesse et chez les femmes en âge de procréer sans contraception efficace, les spécialités à base de valproate dans le traitement des accès maniaques des troubles bipolaires (en France, Dépakote®  et Dépamide® sont les seules spécialités à base de valproate qui disposent d’une AMM dans cette indication) ;
  • d’autre part, soit évalué le besoin de mesures complémentaires de réduction du risque, voire de la mise en place d’autres mesures relatives aux AMM des spécialités à base de valproate, pour toutes les indications.

De nouvelles données ont été présentées par le Royaume-Uni mettant en évidence un manque d’efficience des mesures de réduction du risque mises en place sur le territoire.

Lors de la réunion de mars, le PRAC a lancé une revue de l’ensemble des données disponibles sur l’efficience des mesures de réduction du risque mises en place suite à l’arbitrage de 2014. Il prévoit également de consulter des associations de patients et de professionnels de santé et d’organiser une audition publique.  

Les Pays-Bas et la Belgique ont été désignés comme rapporteur et co-rapporteur de cette procédure d’arbitrage. Une prochaine discussion par le PRAC aura lieu en juin 2017.

Renforcement de l’information sur les risques en France  

Pour rappel, l’ANSM a publié sur son site le 03 mars dernier, un point d’information concernant des mesures additionnelles de réduction du risque. En effet, depuis le 1er  mars 2017, un pictogramme alertant sur les dangers de la prise de médicaments contenant du valproate ou un dérivé pendant la grossesse (Dépakine® , Micropakine®  et génériques, et Dépamide® , Dépakote) a été apposé sur les conditionnements extérieurs. De plus, des courriers d’information co-signés par la CNAMTS et l’ANSM ont été également adressés aux professionnels de santé puis aux patientes ayant eu au moins une prescription de valproate en 2016. Ces courriers renforcent l’information auprès des prescripteurs sur la nécessité d’une adaptation précoce de la prise en charge thérapeutique de leurs patientes pour prévenir ainsi l’exposition des femmes enceintes au valproate ou dérivés. Les courriers adressés aux femmes concernées ont pour objectif de renforcer en parallèle leur information. Enfin, il a été rappelé qu’une carte patiente a été diffusée aux professionnels de santé concernés le 13 février 2017 et doit systématiquement être remise aux patientes lors de la visite annuelle chez le médecin spécialiste (neurologue, pédiatre ou psychiatre), en complément du formulaire d’accord de soins et de la brochure d’information déjà disponibles.

Valproate et dérivés : renforcement de l’information sur les risques - Point d'Information  (02/03/2017)

Signal de pharmacovigilance pour docétaxel

Le docétaxel est un médicament anticancéreux de la famille des taxanes indiqué pour le traitement des cancers du sein, de certains cancers du poumon, de la prostate, les adénocarcinomes gastriques et des cancers ORL. Le princeps est commercialisé sous le nom de Taxotere® et il existe de nombreux génériques.

Suite à la survenue de cas d’entérocolites d’issue fatale et d’une possible augmentation des effets indésirables rapportés avec ce médicament au niveau national, la France a demandé qu’une évaluation européenne du profil de tolérance de l’ensemble des spécialités à base de docétaxel soit conduite en parallèle de l’enquête de pharmacovigilance et des investigations complémentaires menées en France.

Lors de la réunion du mois de mars 2017, le PRAC a démarré l’évaluation du signal issu des déclarations de cas d’effets indésirables ayant conduit l'ANSM, conjointement avec l’INCa, à communiquer pour recommander d’éviter temporairement l’utilisation de docétaxel. Le PRAC a examiné les analyses préliminaires réalisées par l’EMA dans Eudravigilance entre janvier 2015 et janvier 2017, et a considéré qu’il n’y avait pas d‘augmentation de la fréquence de survenue des entérocolites neutropéniques au cours de des 2 dernières années avec le docétaxel (génériques et princeps). Cependant, des analyses complémentaires vont être réalisées dans Eudravigilance, dont les résultats seront discutés par le PRAC au mois d’avril, conjointement avec ceux de l’enquête française de pharmacovigilance.

A l’issue de cette réunion du PRAC du mois de mars,  l’EMA a communiqué sur son site pour informer de l’évaluation en cours au niveau européen, tout en mentionnant que les effets rapportés sont des effets connus avec le docétaxel, et que l’évaluation préliminaire qui a été menée ne montre pas d’augmentation de leur fréquence au cours des deux dernières années. L’EMA rappelle que le docétaxel est une option thérapeutique importante et maintient que ce produit peut être utilisé conformément aux recommandations de l’AMM.

En France l’ANSM et l’INCa ont, à titre de précaution, recommandé d’éviter temporairement l’utilisation du docétaxel dans les cancers du sein localisés, opérables.

Une information a été adressée aux professionnels de santé exerçant dans les centres autorisés à traiter les patients atteints de cancer

Docétaxel - cas d’entérocolites d’issue fatale : l’INCa en lien avec l’ANSM recommande à titre de précaution d’éviter temporairement l’utilisation du docetaxel dans les cancers du sein localisés, opérables - Point d'Information  (17/02/2017)

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