1 2 3 4 5 6 7 8

Rappels généraux sur la pharmacovigilance et les données de la base nationale de pharmacovigilance

Les effets indésirables liés au médicament sont recueillis en France dans le système de pharmacovigilance par, notamment, l’intermédiaire des centres régionaux de pharmacovigilance. Ces effets sont enregistrés dans une base nationale de données depuis 1985.

La base nationale de pharmacovigilance est un système reposant sur la notification spontanée par les professionnels de santé qui est conçu pour faire remonter des signalements, en particulier quand les effets indésirables sont graves ou inattendus afin de déclencher des alertes, de modifier les autorisations de mise sur le marché des produits, voire de réévaluer leur rapport bénéfices/risques. Par ailleurs, depuis juin 2011, l’ANSM a mis en ligne des documents et les informations permettant aux patients et aux associations de patients de déclarer les effets indésirables.

La base nationale de pharmacovigilance n’est pas spécifiquement conçue pour surveiller la fréquence de ces effets indésirables ni leur impact sur la population française. Ceci est d’autant plus vrai que l’on sait qu’il existe pour tous les systèmes de vigilance une sous-déclaration notoire. Celle-ci a été estimée dans une approche globale à environ 10 % (un cas sur 10 serait signalé) mais ce taux est éminemment variable en fonction de plusieurs paramètres :

  • la nouveauté du médicament. La déclaration est d’autant plus importante que le médicament vient d’être mis sur le marché, les professionnels de santé étant légitimement plus sensibles à déterminer son profil de sécurité.
  • la gravité de l’effet indésirable. Les effets indésirables très graves sont davantage notifiés que ceux qui le sont moins.
  • le caractère attendu par rapport au profil de sécurité connu du médicament. Les effets indésirables listés dans les résumés des caractéristiques des produits et leurs notices sont ainsi moins déclarés que les effets inattendus.
  • le caractère inattendu par rapport au terrain ou à la pathologie pour lesquels le médicament est pris ou enfin par rapport au profil de sécurité connu du médicament.
  • le caractère aisément rattachable à un produit de santé. On sait que des effets exceptionnels en population générale, très graves et bien connus pour certains médicaments, sont déclarés de façon quasi exhaustive.
  • la notoriété de l’effet indésirable. Il y a toujours une recrudescence des déclarations après médiatisation d’un effet indésirable. Pour cette raison, on attend une recrudescence des déclarations en 2013 après la médiatisation fin 2012 autour du risque veineux sous pilules.

Note : le nombre de cas doit être analysé en fonction de l’exposition (volumes de ventes et durée de la mise sur le marché).

Analyse des cas de décès par effets thromboemboliques veineux notifiés dans la base nationale de pharmacovigilance depuis 1985 chez les femmes exposées à un contraceptif oral estroprogestatif combiné (COC) au 4 janvier 2013

A la date du 04 janvier 2013, 15 cas de décès sous COC ont été identifiés dans la base nationale de pharmacovigilance, en utilisant une requête portant sur les événements emboliques et thrombotiques veineux et sur les événements emboliques et thrombotiques, à type de vaisseau non précisé, artériel et veineux mixtes, chez des femmes de moins de 50 ans, exposées à une contraception orale combinée estroprogestative.

Parmi ces 15 cas, 2 cas ont été exclus (effets indésirables après exposition in utero dans 1 cas et effets indésirables non veineux dans le second cas).

Ainsi, 13 cas de décès  par événement thromboembolique veineux (+/- artériel) chez des femmes sous COC ont été retenus.
La répartition de ces cas par génération de COC est la suivante :
- 1 cas pour la 1ère génération (COC 1G)
- 6 cas pour la 2ème génération (COC 2G)
- 4 cas pour la 3ème génération (COC 3G)
- 2 cas pour la 4ème génération (COC 4G)

Ces répartitions sont à mettre en perspective avec les données d’exposition de ces différents types de COC, en sachant que les autorisations de mise sur le marché sont plus anciennes pour les COC de 1ère et 2ème générations.

Evolution dans le temps des notifications
La répartition dans le temps de ces cas suit la date de mise sur le marché des différentes spécialités et aucune tendance ne peut être établie compte tenu du nombre limité de cas. A noter que 4 des 6 cas survenus chez des patients sous COC de 3ème ou 4ème génération ont été rapportés entre 2009 et 2012.

Analyse démographique des cas rapportés
La répartition par âge : 5 femmes étaient âgées de 40 ans ou plus et 8 femmes étaient âgées de moins de 40 ans (dont 6 âgées de moins de 30 ans), les extrêmes étant de 16 et 49 ans.

Délai de survenue par rapport à l’initiation du COC suspecté
Il est non renseigné dans 3 des 13 cas. Dans 5 des 10 cas restants, il est inférieur ou égal à 1 an. Le délai de survenue rapporté varie de 2 mois à 19 ans après l’initiation du COC suspecté.

Cause rapportée de décès
Les principales causes rapportées de décès sont :
- embolie pulmonaire
- thrombose veineuse cérébrale

Traitements associés
La présence d’un traitement associé pouvant être impliqué dans la genèse de l’événement veineux est identifiée dans un cas sur les 13.

Facteurs de risque
La présence d’au moins un facteur de risque et/ou de circonstances ayant pu favoriser la thromboembolie veineuse est retrouvée dans 12 cas sur 13 (92%) .

Conclusion

Au total, 13 cas de décès par événement thromboembolique veineux rapportés chez des femmes recevant une contraception orale combinée ont été enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance en France (depuis 1985). Dans 12 cas, ces femmes présentaient d’autres facteurs de risque.
Ces données montrent un nombre de décès par événement thromboembolique veineux sous COC bien inférieur aux données estimées par la pharmaco-épidémiologie, qui permettent la meilleure approche du risque. Ces deux outils de la pharmacovigilance sont complémentaires.

Analyse des cas d’effets thromboemboliques veineux notifiés dans la base nationale de pharmacovigilance en France depuis 1985

A la date du 4 janvier 2013, 567 déclarations  enregistrées dans la base nationale de pharmacovigilance, ont été répertoriées, en utilisant une requête portant sur les événements emboliques et thrombotiques veineux et sur les événements thrombotiques et emboliques, à type de vaisseau non précisé, artériel et veineux mixtes,  chez des femmes de moins de 50 ans, exposées à une contraception orale combinée estroprogestative de 2ème ,3 ème  ou 4ème générations et après exclusion des cas de décès.
Cette analyse est principalement focalisée sur les cas concernant des femmes exposées à des COC de 2ème  et  4ème  générations.

Le tableau suivant donne la répartition des effets déclarés par génération de COC:

  COC 2G COC 3G COC 4G
Nombre de cas notifiés 262 244 61
% 46% 43% 11%

Les principaux effets déclarés concernaient la survenue de thromboses veineuses (thrombose veineuse profonde –TVP-  des membres inférieurs –MI- ou supérieurs –MS- et quelques thromboses veineuses superficielles - TVS), des embolies pulmonaires (EP) et des thromboses veineuses cérébrales (TVC).

Le tableau ci-dessous résume la répartition de ces événements par type de COC :

N (%) COC 2G COC 3G COC 4G
Thrombose veineuse profonde (MI + MS) + Thrombose veineuse superficielle 57 (22%) 76 (31%) 17 (28%)
Embolie Pulmonaire 87 (33%) 98 (40%) 29 (48%)
Thrombose veineuse cérébrale 41 (16%) 33 (14%) 9 (15%)
Autres 77(29%) 37 (15%) 6 (9%)
Total 262 (100%) 244 (100%) 61(100%)

 Analyse des données concernant les effets rapportés sous COC 3G

L’âge moyen, dans les cas analysés, des femmes prenant une COC 3G était de 30 ans, avec une médiane à 28 ans et des extrêmes allant de 15 à 49 ans. 166 femmes avaient moins de 35 ans, 54 entre 35 et 45 ans et 24 plus de 45 ans.

Les facteurs (FdR) de risque associés à ces thromboses se répartissent en trois catégories :

  • Facteurs de risque biologiques : anomalies lipidiques ou thrombophilie
  • Facteurs de risque intrinsèques : surpoids (indice de masse corporel (IMC) > 25 kg/m2 ), migraine, cancer, lupus
  • Facteurs de risque extrinsèques : tabac, immobilisation, voyage (avion > 5h), traitement à risque de thrombose veineuse

La répartition des facteurs de risque était la suivante :

  Présent Absent Non documenté Total
FdR biologique 69 68 107 244
FdR intrinsèque 78 48 118 244
FdR extrinsèque 79 38 127 244

L’indice de masse corporelle (IMC) était renseigné chez 81 femmes; chez 25 d’entre elles (31%) l’IMC était supérieur à 25 kg/m2 .

L’évolution des patientes, après survenue de l’effet rapporté, a été indiquée de la façon suivante dans les notifications analysées :

Total Guérison avec séquelles Guérison en cours Guérison sans séquelle Guérison non renseignée ou sujet non encore rétabli
244 26 17 155 46

Analyse des données concernant les effets survenus sous COC 4G

L’âge moyen, dans les cas analysés, des femmes prenant une COC 4G était de 28,3 ans, avec une médiane à 26 ans et des extrêmes allant de 15 à 48 ans ; 46 femmes avaient moins de 35 ans, 12 entre 35 et 45 ans et 3 plus de 45 ans.

Nous avons analysé les facteurs de risque associés à ces thromboses en trois catégories :

  • Facteurs de risque biologiques : anomalies lipidiques ou thrombophilie
  • Facteurs de risque intrinsèques : surpoids (indice de masse corporel (IMC) > 25 kg/m2 ), migraine, cancer, lupus
  • Facteurs de risque extrinsèque : tabac, immobilisation, voyage (avion > 5h), traitement à risque de thrombose veineuse

La répartition des facteurs de risque était la suivante :

  Présent Absent Non documenté Total
FdR biologique 9 17 35 61
FdR intrinsèque 13 21 27 61
FdR extrinsèque 19 11 31 61

L’indice de masse corporelle (IMC) était renseigné chez 29 femmes ; chez 7 d’entre elles (24%) l’IMC était supérieur à 25 kg/m2 .

L’évolution des patientes, suite à l’effet rapporté, a été indiquée de la façon suivante dans les notifications analysées :

Total (N) Guérison avec séquelles Guérison en cours Guérison sans séquelle Guérison non renseignée ou sujet non encore rétabli
61 8 10 30 13

Conclusion

Au total, 13 cas de décès par événement thromboembolique veineux rapportés chez des femmes recevant une contraception orale combinée ont été enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance en France (depuis 1985). Dans 12 cas, ces femmes présentaient d’autres facteurs de risque.

En dehors des décès, 567 notifications ont été rapportées dans la base nationale de pharmacovigilance. On note, parmi celles-ci, une fréquence importante de femmes présentant des facteurs de risque autres que la prise d’un COC.

Ces données montrent un nombre de décès et de thrombose veineuse sous COC bien inférieur aux données estimées par la pharmaco-épidémiologie qui permettent la meilleure approche du risque. Ces deux outils de la pharmacovigilance sont complémentaires.

Analyse des événements artériels notifiés dans la base nationale de pharmacovigilance en France depuis 1985

A la date du 4 janvier 2013, 52 déclarations enregistrées dans la base nationale de pharmacovigilance, ont été répertoriées, en utilisant une requête portant sur les événements  thrombotiques et emboliques artériels  chez des femmes de moins de 50 ans, exposées à une contraception orale combinée estroprogestative de 2ème , 3ème  ou 4ème  génération et après exclusion des cas de décès.

Parmi ces événements thrombotiques et emboliques artériels, 25 ont été notifiés chez des femmes prenant une COC 2G, 23 avec des COC 3G et 4 avec des COC 4G.

Le tableau ci-dessous résume les caractéristiques de ces thrombo-embolies artérielles par génération de contraceptifs 

Evénements (N) COC 2G COC 3G COC 4G
AIT 2 2 2
AVC 9 11 1
IDM 11 6 1
Thromb. artérielle autre 3 4 0
Age moyen (min;max) années 33,4 (17;45) 35,04 (18;48) 32,33 (26;38)

AIT : accident ischémique transitoire ; AVC : accident vasculaire cérébral ; IDM : infarctus du myocarde

Les dates de notification des cas se repartissent entre 1988 et 1998 pour les COC 2G, entre 1992 et 2003 pour les COC 3G et entre 2002 et 2012 pour les COC 4G.

Les facteurs de risque associés à la survenue des thromboses artérielles ne sont pas analysables de façon fiable car ils n’ont été rapportés que dans moins d’un tiers des cas.

Analyse des nouveaux événements thrombotiques notifiés dans la base nationale au 31 janvier 2013 par rapport aux analyses précédentes - nouveaux cas notifiés en janvier 2013 (enregistrés dans la BNPV entre le 4/01 et le 31/01/2013)

Analyse des décès

  Deux nouveaux cas de décès ont été notifiés :

  • Un cas de décès a été notifié le 15 janvier 2013. Il s’agit d’un décès survenu en décembre 1999 suite à un AVC ischémique chez une femme de 45 ans, recevant une contraception par un COC 2G.
  • Un autre cas de décès a été notifié le 8 janvier 2013. Il s’agit d’une femme de 22 ans, traitée au long cours pour une migraine, qui était précédemment sous un COC avec un changement en août 2012 pour une contraception par un COC 3G. En septembre 2012, la patiente est hospitalisée dans un contexte de dyspnée et de cyanose avec, ensuite, survenue d’un premier arrêt cardio-circulatoire. Malgré des mesures de réanimation importantes la patiente décédera 24 heures plus tard d’une embolie pulmonaire confirmée.

Analyse des événements  thrombotiques

A la date du 31 janvier 2013, 36 déclarations supplémentaires ont été enregistrées dans la base nationale de pharmacovigilance. Elles ont été répertoriées, en utilisant une requête portant sur les événements  thrombotiques et emboliques artériels et veineux  chez des femmes de moins de 50 ans, exposées à une contraception orale combinée oestroprogestative de 1ère , 2ème , 3ème  ou 4ème  génération et après exclusion des cas de décès.

Parmi ces 36 cas, 31 événements étaient des thromboses veineuses et 5 des thromboses artérielles.

Cinq cas de thromboses ont été notifiés chez des femmes prenant une COC 2G, 24 sont survenus sous contraception par des COC 3G et 7 avec des COC 4G.

Le tableau ci-dessous résume les caractéristiques de ces thrombo-embolies, par génération de contraceptifs

Evénements (N) COC 2G COC 3G COC 4G
EP 2 16 2
TVP 1 2 3
TVC 1 1 0
TV autre 1 1 1
IDM 0 0 1
AVC 0 1 0
AIT 0 2 0
Thromb. artérielle autre 0 1 0
Age moyen (min;max) années 27,4 (17;43) 33,6 (16;46) 35,6 (19;49)

AIT : accident ischémique transitoire ; AVC : accident vasculaire cérébral ; IDM : infarctus du myocarde
TVP : thrombose veineuse profonde ; TVC : thrombose veineuse cérébrale ; TV : thrombose veineuse
EP : embolie pulmonaire

Parmi ces 36 notifications récentes, le délai entre la survenue de l’épisode thrombotique et la notification était inférieur ou égal à 3 mois dans 21 cas, compris entre 3 et 12 mois dans 9 cas et supérieur à un an dans 6 cas.

Les facteurs de risque associés à la survenue de ces thromboses ne sont pas analysables de façon fiable, car ils n’ont été rapportés que dans moins d’un tiers des cas.

 

Conclusion

Ce bilan est un point d’étape qui initie la diffusion mensuelle des notifications d’événements thrombotiques veineux et artériels qui seront réalisées à partir des données de la base nationale de pharmacovigilance.

 Les premières conclusions que l’on peut en tirer sont qu’entre 1985 et 2012 (28 ans), 567 déclarations ont été notifiées, soit une moyenne d’environ 20 cas par an, pour les  COC de 2ème, 3ème et 4ème générations.

 L’analyse du mois de janvier 2013 fait apparaître une notification plus importante, avec 36 cas rapportés, dont 21 peuvent être considérés comme de "nouveaux cas incidents notifiés", le délai entre l’événement et la notification à un centre régional de pharmacovigilance étant inférieur à 3 mois. Nous nous attacherons au cours des prochains rapports mensuels de surveillance à dissocier ces nouveaux cas incidents notifiés des nouveaux cas liés aux recueils rétrospectifs de déclarations.

1 2 3 4 5 6 7 8